Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T04.djvu/444

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
436
CARDAN.

sans oublier que son ami avait un talent très-rare ; c’était d’être propre aux affaires, et fort savant. Il est sûr que ces deux choses ne vont guère de compagnie [1] ; car la grande application à l’étude empêche ordinairement d’être bien capable d’un emploi public, c’est-à-dire, des emplois qui ne sont pas littéraires. Et id omnes in te admirait sint quod in paucis reperitur, doctrina cum rerum agendarum ratione conjuncta. Quotus enim quisque est, qui cognitione et actione excellat, ut tu, Servili, facis ? Eloquentiæ verò, tunc privatum specimen exhibuisti, cùm orationem non jejunam, non nudam, sed rerum genere eruditam, varietate copiosam, sententiis illustratam, verborum selectione cultam, schematibus pictam, atque dicendi forma ornatam, apud illustriss. Palmæ novæ urbis ædificandæ præfectos, ut unus e septem designatis, habuisti : quam vir eruditus et eloquens Augustinus Michaeles, ne tanto bono bonarum literarum studiosi carerent, tuâ cum laude in lucem dedit [2].

Cette épître dédicatoire est datée de Venise, le 5 de juin 1597.

  1. Voyez la préface sur les œuvres de Sarrasin.
  2. Lud. Carbo, epist. dedicat., Introd. in Logicam, folio a 4 verso.

CARDAN (Jérôme), médecin [* 1] et l’un des plus grands esprits de son siècle, naquit à Pavie, le 24 de septembre 1501 [a] (A). Comme sa mère n’était point mariée (B), elle fit tout ce qu’elle put pendant sa grossesse pour perdre son fruit ; mais les breuvages qu’elle avala n’eurent point la vertu qu’elle souhaitait [b]. Elle fut trois jours en travail d’enfant, et il lui fallut arracher du corps le fils dont elle était grosse. Il avait déjà la tête garnie de cheveux noirs et frisés [c]. Il avait quatre ans, lorsqu’on le porta à Milan [d], où son père était avocat [e], et il en avait huit, lorsque dans une maladie dangereuse on le voua à saint Jérôme. Ce fut son père qui fit ce vœu : il aima mieux recourir à l’assistance de ce saint, qu’à celle de son démon familier ; il se vantait hautement d’en avoir un. Son fils ne s’avisa jamais de lui demander la raison d’une telle préférence [f]. À vingt ans il s’en alla étudier dans l’université de Pavie : deux ans après, il y expliqua Euclide. Il alla à Padoue l’an 1524 : il reçut en la même année le degré de maître ès-arts ; et, sur la fin de l’année 1525, celui de docteur en médecine [g]. Il se maria sur la fin de l’année 1531 [h]. Il avait été incapable, pendant les dix années précédentes, d’avoir à faire avec une femme (C) ; ce qui l’affligeait beaucoup. Il avait trente-trois ans accomplis, lorsqu’il commença d’être professeur en mathématiques à Milan. Deux ans après, on lui offrit une profession en médecine à Pavie, qu’il refusa, ne voyant point d’où l’on tirerait le paiement de ses gages [i]. L’an 1539, il fut agrégé au collége des médecins de Milan ; et l’an 1543, il enseigna publiquement la médecine dans la même ville. Il fit la même chose à Pavie l’année sui-

  1. * Chaufepié a consacré à Cardan quatorze lignes qu’il a extraites des Mémoires de Niceron, tom. XIV.
  1. Cardan., de Vitâ propr., pag. 12, edit. Paris., 1643, in-8°.
  2. Cardanus, de Vitâ propr., pag. 7.
  3. Ibid., pag. 8.
  4. Ibidem, pag. 13.
  5. Voyez dans la remarque (S) quelques particularités touchant cet homme.
  6. Cardanus, de Vitâ propriâ, pag. 14.
  7. Ibidem, pag. 16, 17.
  8. Ibidem, pag. 19.
  9. Ibidem.