Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T05.djvu/466

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
456
DÉMÉTRIUS.

les ont cités ὁμώνυμα et συνώνυμα sont la même chose. On peut aussi soutenir que si l’auteur employa l’un de ces deux mots pour intituler l’un de ses livres, et l’autre pour intituler l’autre, ce ne fut pas à dessein de marquer quelque distinction ; car il est visible que la notion selon laquelle on fait un traité des villes qui se nomment Antioche, est la même que l’on suit en faisant un livre touchant les auteurs qui se nomment Thalès ou Aristophane ; et ainsi la distinction des logiciens entre ὁμώνυμα æquivoca et συνώνυμα univoca ne peut avoir lien en cette rencontre. Maussac aurait dû se souvenir que le livre cité par Étienne de Byzance et par Harpocration, ἐν τοῖς συνωνύμοις, traitait des villes qui se nommaient les unes comme les autres. Or, il n’y a point d’apparence que Plutarque ait eu en vue ce livre-là : il a sans doute cité le livre où Démétrius parlait des personnes qui avaient eu nom Démosthène. Ce n’est donc pas bien réfuter la conjecture de Casaubon, que de dire : Étienne de Byzance a cité Démétrius Magnès ἐν συνωνύμοις, il faut donc laisser dans Plutarque le terme συνωνύμων [1]. La réfutation serait moins mauvaise, si l’on pouvait soutenir que le livre dont Diogène Laërce a donné le titre n’est pas celui dont Plutarque a fait mention. Mais on ne saurait soutenir cela sans combattre la vraisemblance ; et il est certain que Casaubon a considéré comme un même livre celui que Plutarque, et celui que Diogène Laërce ont allégué. Il fallait donc le combattre dans ce fort-là. Notez une chose singulière : Berkélius n’avait aucune notion de notre Démétrius Magnés, car voici la note qu’il fait sur ces paroles d’Étienne le Bysantin, Δημήτριος ἐν συνωνύμοις ; Fortassis intelligendus Demetrius cognomento Ixion, qui, ut Suidas auctor est, quædam ad grammaticam spectantia conscripsit [2]. Il est surprenant que sa mémoire ne lui ait pu rien fournir touchant notre Démétrius, de qui plusieurs anciens et plusieurs modernes ont dit bien des choses ; mais, outre cela, il est digne de censure, en ce qu’il a cru qu’Étienne le Byzantin citait un ouvrage de grammaire. Il était plus naturel de dire que c’était quelque traité qui se rapportait, ou à l’histoire ou à la géographie, car on le cite sur un nom qui était celui d’une ville et celui d’une rivière. Cette sorte d’homonymes ou de synonymes n’appartiennent pas à un grammairien en tant que tel. J’ajoute cette restriction, parce qu’il y a une espèce d’homonymies ou de synonymies, qui ne sont que du ressort de la grammaire, et sur quoi les anciens publièrent des écrits. Maussac [3] a raison d’observer qu’après que la multitude de livres, composés par des auteurs de même nom, ou sur la même matière, eut fait que l’on confondait les écrits d’un homme avec les écrits d’un autre, la critique qui, avant cela, ne s’occupait qu’à discerner si un ouvrage était supposé ou légitime, se mêla d’un nouvel emploi, c’est-à-dire de discerner les ouvrages qui appartenaient à chacun des écrivains homonymes. Il nomme trois auteurs qui s’attachèrent à cette partie de la critique : le premier est notre Démétrius Magnès ; il appelle le second Simarestus, et le troisième Denys de Sinope [4]. Consultez Wower, au chapitre XVI de son Traité de Polymathiâ [5]. Mais n’oublions pas ce que Jonsius observe [6] ; c’est que l’ouvrage de Denys de Sinope était une comédie [7], et que celui de Simarestus était un ouvrage de grammaire [8]. Ainsi Casaubon et Maussac les ont mal associés avec Démétrius Magnés. Ils eussent mieux fait s’ils lui

  1. Composuerat et hic autor libros περὶ συνωνύμων, ut testatur Plutarchus in Vitâ Demosthenis, malè enim illo loco vir quidam doctissimus legendum censet Δημήτριος Μάγνης ἐν τοῖς περὶ ὁμωνύμων, pro συνωνὺμων, autor Stephanus apud quem voce ἀλαϐάν, citatur idem Demetrius ἐν σουνωνύμοις. Mauss., Dissert. crit. de Harpocrat., pag. 398.
  2. Berkel., in Steph. Byzant., pag. 87.
  3. Mauss., Dissertat. crit., de Harpocrat., pag. 398,
  4. Ita Simarestus quidam libros περὶ συνωνύμων composuerat. Hinc etiam Dionysii Sinopensis περὶ ὁμωνύμων tractatus apud Ulpianum Demosthenis ἐξηγητήν. Idem, ibid.
  5. Pag. m. 126.
  6. Jonsius, de Scriptor. Histor. Philosoph., pag. 250.
  7. Voyez Athénée, lib. IX, cap. VII, pag. 381.
  8. Jonsius, de Scriptor. Histor. Philosoph., pag. 448.