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ÉPICURE.

te Diodoro. Ut ita Athenæus historiam belli Phocici à patre et filio simul descriptam utrique eorum dubiè non immeritò tribuat[1]. Je n’ai point trouvé que Diodore de Sicile observe qu’Éphore chargea son fils de suppléer à son histoire ce qui y manquait, et je trouve que si Jonsius a lu cela dans Diodore de Sicile, il n’a pas du parler tantôt en doutant, fortè, tantôt d’un ton décisif.

  1. Jonsius, de Script. Hist. Phil., pag. 44.

ÉPICURE, l’un des plus grands philosophes de son siècle, naquit à Gargettium (A) dans l’Attique, l’an 3 de la 109e. olympiade[a] (B). Son père Néoclès, et sa mère Chérestrata (C), furent du nombre des habitans de l’Attique que les Athéniens envoyèrent dans l’île de Samos[b]. C’est ce qui fit qu’Épicure passa dans cette île les années de son enfance. Il ne revint à Athènes qu’à l’âge de dix-huit ans[c]. Ce ne fut pas pour s’y fixer ; car à l’âge de vingt-trois ans il alla trouver son père qui demeurait à Colophon ; et depuis, il séjourna en divers endroits avant que de se fixer à Athènes, comme il fit à l’âge d’environ trente-six ans[d]. Il se mit à ériger une école dans un beau jardin qu’il acheta[e] : il y vécut avec ses amis fort tranquillement, et il y éleva un grand nombre de disciples. Ils vivaient tous en commun avec leur maître (D), et l’on n’avait jamais vu de société mieux réglée que celle-là. Le respect que ses sectateurs conservèrent pour sa mémoire est admirable. Son école ne se divisa jamais ; on y suivit sa doctrine comme un oracle[f]. Son jour natal était encore solennisé du temps de Pline, et l’on fêtait même tout le mois de sa naissance. Ils mettaient son portrait partout[g]. Il écrivit beaucoup de livres, et il se piquait de ne rien citer (E). Il mit dans une extrême réputation le système des atomes. Il n’en était pas l’inventeur[h] ; mais il y changea quelque chose, et ce ne fut pas toujours une vraie réparation : car, par exemple, ce fut gâter le système, que de ne pas retenir la doctrine de Démocrite touchant l’âme des atomes (F). Ce qu’il enseigna sur la nature des dieux est très-impie (G). Quant à sa doctrine touchant le souverain bien ou le bonheur, elle était fort propre à être mal interprétée, et il en résulta de mauvais effets qui décrièrent sa secte : mais au fond elle était très-raisonnable, et l’on ne saurait nier qu’en prenant le mot de bonheur comme il le prenait, la félicité de l’homme ne consiste dans le plaisir. C’est en vain que M. Arnauld a critiqué cette doctrine (H). Les stoïciens qu’on pourrait nommer les pharisiens du paganisme, firent tout ce qu’ils purent contre Épicure, afin de le rendre odieux et de le faire persécuter. Ils lui imputèrent de

  1. Diog. Laërt., in Epicuro, lib. X, num. 14.
  2. Diog. Laërt., in Epicuro, lib. X, num. 1.
  3. Ibidem.
  4. Voyez Gassendi de Vitâ et Moribus Epicuri, lib. I, cap. III.
  5. Laërt., in Epicuro, lib. X, num. 10.
  6. Voyez la remarq. (D).
  7. Gassendi, de Vitâ et Moribus Epicuri, lib. II, cap. IV, ex Ciceron., lib. V, de Finib., init. et ex Plinio. lib. XXXV, cap. II.
  8. Voyez l’art. de Leucippe, tome IX.