comparatif pour relever l’importance de la doctrine des anciens philosophes de la Grèce.
Quamquàm multa benè ac divinitùs invenientes
Ex adyto tamquàm cordis responsa dedêre
Sanctiùs, et multò certà ratione magis, quàm
Pythia, quæ tripode ex Phœbi, lauroque profatur[1].
Qui ne voit que dans l’un et l’autre
de ces deux passages il s’exprime selon
les idées du peuple, et non pas
selon les principes de sa secte ? Car
selon lui les réponses de la prêtresse
d’Apollon ne pouvaient être que les
fantaisies d’un cerveau malade, ou
d’un imposteur ignorant. Il ne reconnaissait
aucune divinité dans les
oracles : ce n’était donc pas donner
une grande idée d’un dogme philosophique,
que d’assurer qu’il était
meilleur que les oracles de Delphes.
C’est comme si nous disions aujourd’hui,
que les pensées de M. Descartes
sont plus dignes d’attention que les
prophéties de ces diseuses de bonne
aventure qui courent de lieu en lieu.
Il est donc clair que Lucrèce accommodait
son langage aux opinions populaires,
et que l’on serait coupable
d’une chicanerie ridicule, si l’on
soutenait que la force de la vérité lui
arracha quelquefois des confessions
qui renversaient son système, et qui
le convainquaient de se contredire
grossièrement : que par exemple il a
reconnu en deux endroits de ses poésies,
qu’il y avait quelque chose de
divin, d’inspiré, de surnaturel et
de prophétique, dans les oracles
d’Apollon.
(M) On prétend qu’il a été disciple de Zénon. Ceux qui ont critiqué cela n’ont pas trop bien réussi. ] Si l’on admet une fois le sentiment de ceux qui disent que Lucrèce fut envoyé à Athènes pour y étudier, on ne pourra guère révoquer en doute qu’il n’ait été l’un des disciples de Zénon, le chef de l’école d’Épicure en ce temps-là. Aussi voyons-nous que Lambin et Gifanius joignent ensemble ces deux opinions : Credibile est Lucretium… sese Athenas contulisse ibique Zenonem illum epicureorum coryphæum audivisse[2]. Voilà ce que dit Lambin, et voici les paroles de Gifanius[3] : Præerant hortis eo tempore Zeno acriculus ille senex et Phædrus homo, ut Cicero ait, humanissimus, itaque his videtur usus præceptoribus Titus, quos etiam Atticus paulò licet hoc poëta grandior audivit. M. le baron des Coutures a suivi les mêmes traces : il est vraisemblable, dit-il[4], que Lucrèce… alla à Athènes, où Zénon qui était l’honneur de la secte épicurienne, s’était acquis une estime générale. On a inséré dans la Bibliothéque Universelle[5] une lettre qui contient quelques remarques contre ce baron. La dernière est celle-ci : Enfin la 5e bévue est que Zénon est dit avoir été l’honneur de la secte épicurienne, au lieu qu’il est reconnu pour le chef des stoïciens. Le censeur n’a pas pris garde qu’il y a eu plus d’un Zénon : il a cru qu’on avait voulu parler du fondateur des stoïques, et sur ce pied-là il devait trouver dans les paroles qu’il critiquait une insigne faute de chronologie dont il ne parle pas. Zénon, le chef des stoïciens, mourut la 1re. année de la 129e. olympiade ; il faut donc dire que sa mort a précédé de plus de 160 ans la naissance de Lucrèce. On devait donc soupçonner que l’auteur que l’on censurait avait eu en vue un Zénon différent du fondateur des stoïques ; et si ce soupçon avait engagé à quelques recherches, on aurait trouvé un fameux épicurien nommé Zénon[6], qui enseignait dans Athènes au temps de Lucrèce.
(N) En réfutant M. Moréri. ] 1o. Il ne devait pas dire que notre poëte s’appelait T. Carus Lucrèce. Carus n’était point son nom, mais son surnom, cognomen ; 2o. par ces mots, Romain de nation, Moréri a voulu dire sans doute que Lucrèce était né à Rome. C’est mal exprimer sa pensée ; car où est l’auteur exact qui ferait difficulté de soutenir que Cicéron et Tite-Live sont Romains de nation, comme Démosthène et Thucydide sont Grecs de nation ? 3o. On n’a nulle preuve que Lucrèce soit né à Rome ; il ne fallait donc pas lui donner affirmativement cette patrie, comme a