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MÉTELLA.

devint dangereusement malade, dans le temps que son mari faisait des festins au peuple, à l’occasion d’un grand vœu. Il avait consacré à Hercule la dixième partie de son bien, et il traita magnifiquement le peuple pendant plusieurs jours. Les prêtres lui déclarèrent qu’il ne lui était point permis d’aller voir sa femme, ni de souffrir que sa maison fût souillée par la mort de qui que ce fût. C’est pourquoi il envoya à Métella la lettre de divorce, et ordonna qu’on la portât hors de chez lui avant qu’elle mourût. La superstition lui fit faire toutes ces choses malgré lui ; car il fut fort affligé de perdre sa femme, et il lui fit des funérailles très-magnifiques pour soulager sa douleur [a]. Dans la même vue, il fit aussi de grands festins à ses amis, sans avoir égard aux lois somptuaires qu’il avait lui-même établies [b]. Il les enfreignit hautement, lui qui n’avait osé violer les cérémonies ridicules et barbares que les prêtres lui avaient marquées. Si le fils d’Ésope a été aimé d’une Métella (D), comme il y a quelque apparence, j’ai un grand penchant à croire que les deux dames galantes qu’on vient de voir, ne sont pas les seules de leur nom qui se soient mal comportées.

Quelques auteurs donnent le nom de Métella à l’une des femmes de Pompée, qu’il répudia pour ses impudicités [c] ; mais il vaut mieux la nommer Mucie. J’en parle sous ce mot-là.

  1. Καὶ τοῦτο μὲν ἀκριϐῶς τὸ νόμιμον ὑπὸ δεισιδαιμονίας ἐτήρησε· τὸν δὲ τῆς ταϕῆς ὁρίζοντα τήν δαπάνην νόμον αὐτὸς παρεἰσενηνοχὼς παρέβη, μηδενὸς ἀναλώματος ϕεισάμενος. Atque hâc in re leges curiosè ex superstitione servavit : at legem funerariam, quam tulerat ipse, convulsit nullo habito sumptûs modo. Plutarch, in Syllâ, pag. 474. B.
  2. Idem, ibidem.
  3. Voyez Bisselius, Ruinar. illustr., decade IV, parte IV, pag. 2984.

(A) Je ne saurais me persuader que ce soit d’elle qu’Horace et Valère Maxime ont parlé. ] Horace nous conte que le fils d’Ésope fit dissoudre dans du vinaigre une perle de grand prix, et l’avala ; et il remarque que cette perle avait servi de pendant d’oreille à Métella [1]. Un vieux scoliaste d’Horace dit que cette Métella était la femme du fils d’Ésope. J’aimerais mieux croire qu’il n’y avait entre eux qu’un commerce illégitime. C’est aussi la pensée de M. Dacier. Il doute si cette Métella n’était point la sœur de Q. Cécilius Métellus Numidicus, qui était mariée à L. Lucullus [2]. Je ne saurais croire que ce soit celle-là ; car la femme de ce Lucullus était apparemment vieille lorsque le fils d’Ésope commença à pouvoir faire l’amour. Elle avait une petite-nièce qui épousa Sylla, l’an 665 de Rome, et qui avait déjà d’un autre mari deux enfans prêts à marier. On a vu [3] que la fille de cette femme de Sylla fut mariée avec Pompée. Or elle avait eu déjà un autre mari, et nous savons que Sylla, qui lui avait fait épouser Pompée, mourut l’an 672. Si la petite-nièce était grand’mère en ce temps-là, nous pouvons raisonnablement penser que la grand’tante n’était guère propre à faire l’amour. Ajoutons à cela que Lucullus, fils de Métella la grand’tante, commandait l’armée romaine contre Mithridate, en qualité de consul, l’an de Rome 679, et que Cicéron, quelques années après la bataille de Pharsale [4], fait mention du fils d’Ésope comme d’un hom-

  1. Filius Æsopi detractam ex aure Metellæ
    (Scilicet ut decies solidum exsorberet) aceto
    Diluit insignem baccam...........
    Horat., sat. III, lib, II, vs. 239.

  2. Remarques sur cet endroit d’Horace, tom. VII, pag. m. 301, 302.
  3. Dans le corps de cet article.
  4. Elle se donna, l’an 705.