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MÉZIRIAC.

temps qu’il désigne est, selon toutes les apparences, l’an 650 de Rome. Comment donc s’imaginer que le Métrodore de Persée fût encore en vie ? car on l’avait envoyé à Paul Émile environ l’an 585, comme l’un des plus excellens philosophes qu’on pût choisir dans Athènes. Il est plus facile de réfuter Volaterran, qui a cru non-seulement que le Métrodore, qui fut envoyé à Paul Emile, est le disciple de Carnéade, dont Cicéron vient de parler, mais aussi que sa mémoire artificielle a été louée par Cicéron [1]. Le Métrodore qui a été loué par cet endroit-là, était de Scepsis, et différait du disciple de Carnéade. En voici la preuve démonstrative. Crassus entendit celui-ci dans Athènes [2], et l’autre dans l’Asie. Paulùm sitiens, dit-il [3], istarum artium de quibus loquor, gustavi quæstor in Asiâ, quùm essem æqualem ferè meum ex academiâ rhetorem nactus Metrodorum illum de cujus memoriâ commemoravit Antonius. Il est clair qu’il parle de Métrodore de Scepsis ; car Antoine l’orateur avait dit : Vidi ego summos homines et divinâ propè memoriâ, Athenis Carneadem, in Asiâ quem vivere hodiè aiunt Scepsium Metrodorum, quorum uterque tanquàm litteris in cerâ, sic se aiebat imaginibus in iis locis quos haberet, quæ meminisse vellet, perscribere [4]. Crassus parle peu après en cette manière : Audivi… et Athenis cùm essem, doctissimos viros, et in Asiâ istum ipsum Scepsium Metrodorum quùm de his ipsis rebus disputaret [5].

(C)... Je croirais qu’il parle plutôt de Métrodore de Stratonice. ] Nous avons vu [6] que son Métrodore s’était attaché à Carnéade avec beaucoup d’application. Il dit dans un autre livre, que Métrodore le Stratonicien pouvait bien connaître Carnéade [7]. On peut donc s’imaginer que ces deux endroits concernent la même personne. Nous voyons d’ailleurs dans Diogène Laërce, un Métrodore de Stratonice qui rompit avec Épicure pour suivre l’école de Carnéade. L’historien s’est trompé au temps ; car la mort d’Épicure a précédé la naissance de Carnéade : mais son erreur ne laisse pas de servir à faire croire que Métrodore, celui dont l’orateur Crassus faisait mention, est Métrodore de Stratonice. Quant à la méprise de Diogène Laërce, voyez M. Ménage [8], et les pièces insérées dans le Journal des Savans, que j’ai citées en un autre endroit. [9]

  1. Volaterr., lib. XVII, pag. m. 426.
  2. Voyez la citation (7).
  3. Cicero, de Orat., lib. III, cap. XX.
  4. Cicero, de Orat., lib. II, c. LXXXVIII.
  5. Idem, ibidem.
  6. Dans la remarque précédente, citat. (7).
  7. Benè autem nosse Carneadem Stratoniceus Medrodorus putabatur. Cicero, Academ. Quæst., lib. II, fol. 203, B. Notez que ces paroles n’ont guère de liaison avec les précédentes. On dirait qu’il y a là une lacune.
  8. Menag., in Diog. Laërtium, t. X, num. 9.
  9. Dans la remarque (N) de l’article Carnéade, tom. IV, pag. 472.

MÉZIRIAC (Claude-Gaspar-Bachet, Seigneur de), a été l’un des plus habiles hommes du XVIIe. siècle [* 1]. Il était de Bresse, d’une famille noble et ancienne [a] (A), comme nous l’apprend M. Pélisson avec plusieurs autres particularités bien curieuses que je ne veux pas copier, car elles se trouvent dans un ouvrage [b], qui est entre les mains de tout le monde. Je me contenterai d’en tirer deux choses : la 1°. est que M. de Méziriac passa en sa jeunesse beaucoup de temps à Paris et à Rome, et qu’en ce dernier lieu il fit quantité de vers italiens à l’envi avec M. de Vaugelas, qui s’y trouvait aussi ; la 2°., que lorsqu’il était encore à Paris, il se parla de le faire précepteur du roi Louis XIII, et que cela fut cause qu’il se hâta de quitter la

  1. * Dans les Éloges de quelques Auteurs français, Dijon, 1742, in-8o., Bachet de Méziriac a un article beaucoup plus étendu et plus complet, que celui fait par Bayle, qui y est cependant cité avec éloge.
  1. Pélisson, Histoire de l’Académie française, pag. m. 256.
  2. L’histoire de l’Académie française.