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MILLETIÈRE.

sez ces paroles de M. Sarrau [1] : Arnaldus etiam, quem sibi clàm adstipulari Bachetus [2] arbitrabatur, epistolam edidit ad præsules sui libri approbatores scriptam, in quâ damnatum posteà librum errors, falsitatis, et hæreseos accusare prævertit. Hæc tamen omnia κατ᾽ οἰκονομίαν fieri, jactat Henotes.

.........Credat judæus apella.


Sed quid huic homini facias ? Eum ego, qui tàm insanum sapit, Deo irato suo relinquo.

Depuis l’impression de ce qu’on vient de lire, j’ai parcouru l’ouvrage dont j’ai parlé ci-dessus, c’est-à-dire celui qui fut imprimé à Rouen, l’an 1642. Il a pour titre : Réponses à trois lettres du sieur de la Milletière, sur ses moyens de réunion en la religion ; par André Rivet..… avec la défense dudit sieur Rivet, contre les calomnies et suppositions dudit sieur de la Milletière, en son prétendu catholique réformé ; avec une lettre d’un docte personnage de ce temps sur le même traité. On y voit un chapitre touchant l’Histoire que M. de la Milletière avait donnée de la censure prétendue fausse attribuée à la faculté de Sorbonne. M. Rivet proteste [3] que M. Chappellas, ni aucun de sa part, ne lui avait mis en main cette censure, ni procuré qu’il la fît imprimer..... [4] Celui qui lui en donna la copie en Hollande, lui avait dit qu’elle avait été envoyée par M. Grotius. Il laisse audit sieur Chappellas le soin et la peine de se défendre de ce qui lui était objecté ; mais il réfute deux objections que M. de la Milletière avait faites pour prouver la nullité de la censure de la Sorbonne. « [5] La première est qu’elle n’a pas accoutumé de chanter en l’air sans aucune application raisonnée, et sans spécification des erreurs de l’écrit qu’elle censure. La seconde, que sa façon de faire n’est pas de sonner le tocsin, et crier gare, gare, contre les livres qu’elle censure, et de finir par des apostrophes aux prélats de l’Église... [6] Je m’en vais lui donner deux exemples assez connus du contraire de ce qu’il dit, principalement quand ils condamnent un livre d’un auteur hors de leur communion. L’an 1611, le 22 d’août, ils publièrent leur censure contre le livre de feu M. du Plessis, d’heureuse mémoire, intitulé : le Mystère d’Iniquité, etc. Là ils ne spécifient rien, mais disent en général, qu’ils ont été d’avis que le livre portant ce titre abominable devait être condamné, détesté, et la lecture d’icelui totalement défendue au peuple chrétien, comme étant hérétique, très-furieux, très-séditieux, contraire à la loi divine et naturelle, aux écrits des anciens pères etc. Et puis après ajoutent le gare, gare, comme il parle, en ces termes, qu’ils avertissent Les gens de bien, zélés à la défense de la sainte Église, etc., du péril qui pourrait arriver de la lecture de ce livre ; prient et conjurent (notez) très-humblement MM. les prélats de l’Église catholique, et les magistrats civils, etc., que de tout leur pouvoir ils tâchent généreusement et avec effet d’empêcher le cours d’une peste si dangereuse et si redoutable. Voilà une censure conforme en tous ces deux points à ce que le censuré par la diligence du sieur Chappellas, nie formellement être du style de la Sorbonne. Dira-t-il que cette censure, injurieuse à la personne de l’auteur, et qui ne représente aucune sentence ni maxime du livre qu’elle touche, pour en qualifier l’opinion du nom qui note la cause de la censure, n’est point émanée du jugement de cette compagnie ? En voici encore une autre, sans rien spécifier, et sans faire aucune application raisonnée de l’an 1629, contre les opuscules de Pierre Picherel, qui était décédé en la communion de l’Église romaine, en un petit prieuré de l’abbaye d’Essome, où, sans aucune spécification, le premier de septembre, ils condamnent le livre de Picherel [7] comme méchant et

  1. Sarravius, epist. LXXXV, pag. 85, 86.
  2. Faute d’impression pour Brachètus. Il y en a plusieurs autres de cette nature dans les Lettres de M. Sarrau.
  3. Rivet, Réponses à trois Lettres, pag. 163.
  4. Là même, pag. 164.
  5. Là même, pag. 167.
  6. Là même, pag. 168.
  7. Voyez, touchant ce livre de Picherel, M. Colomiès, Bibliothéque choisie, pag. 21 et 22 de la seconde édition.