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MUTIUS.

nant de Rome. Tant qu’enfin, il fallut que les fauteurs du pape missent la main au sang : car, dit-il, [* 1] quand ils virent que les curez ne faisoient conte ni de leurs menaces, ni de leurs execrations, en ayans empoigné quelques-uns des plus excellens, ils les mirent à mort, en intention d’intimider les autres par cet exemple. Mais, dit-il, il en advint tout autrement, en tant que [* 2] ceux-là aians esté executez à mort, lesquels ils tenoient estre gens de bien, et craignans Dieu, et defenseurs de la verité, ils commencerent à mepriser toute la puissance et authorité du siege romain, et en parler mal, tellement qu’ils avoient pour suspect tout ce qu’ils entendoient plaire audit pontife : et plusieurs, mesmes des autres eveschez, conspiroient avec eux. Tant qu’enfin une si grande multitude non seulement en Allemagne, mais aussi és Gaules, se banda contre l’evesque de Rome, que par tout on faisoit et disoit impunement contre son siege. Et notez ce qu’il dit ; tant en Allemagne, qu’en Gaule : où tout au rebours de l’intention du pape et de son concile tenu à Rome [* 3], ils observoient les prestres non mariez ; et s’ils en surprenoient quelques-uns en paillardise, ils les redarguoient par les textes de l’Ecriture, et des constitutions des papes, et les accusoient publiquement devant le peuple, requerans qu’il fist comparaison d’un paillard, entretenant une putain, et membre de Sathan, avec un homme vivant chastement en mariage, nourrissant et instruisant ses enfans selon l’institution de Dieu. Bref, en ce temps l’eglise occidentale estoit fort troublée, et le ciel estoit meslé avec la terre. Et cette discorde fut cause que plusieurs s’ajoignirent à l’eglise orientale. »

Fronton du Duc, répliquant à cet ouvrage de du Plessis, s’est contenté de cette note générale. Nous ne faisons point d’estat de ce que du Plessis nous entasse ici tiré de l’histoire de Hulric Mutius, lequel on sçait avoir esté protestant de religion, Allemand de nation, et menteur impudent de profession, et toutesfois il ne peut nier que l’empereur enfin ne se mit du costé du pape : et faisant assembler un concile à Mayence presta main forte à la severité de la discipline ecclesiastique, et faisant condamner les refractaires remit en paix l’Alemaigne, et la saincteté du celibat de l’eglise [* 4] ; ce qui vient tout au rebours de ce que du Plessis nous vouloit faire voir icy d’un empereur [1].

FIN DU DIXIÈME VOLUME.
  1. (*) Et paulò post. Ubi animadverterunt Parochos nihil minis, nihil execrationibus moveri, aliquos præstantiores diversæ partis captos interfecerunt, hoc exemplo alios deterrere volentes.
  2. (*) Et paulò post. Supplicio afJectis quos ipsi bonos, et Deum timentes viros, veritatemque defendentes judicabant, inceperunt omnem potestatem et autoritatem Romanæ sedis contemnere, malè de eâ loqui, et quicquid pontifici romano intelligebant placere, illis suspectum erat, conspirabantque multi cum eis etiam sub aliis episcopatibus, donec tanta multitudo non solùm in Germaniâ, sed etiam in Galliâ, in eam contrà romanum pontificem sententiam adducta sit, ut impunè ubique et facerent et dicerent, contrà sedem apostolicam Romæ, etc.
  3. (*) Ibidem. Sacerdotes non uxoratos observabant, deprehensos in scortatione sententiis ex Bibliis et pontificum constitutionibus confutabant, et accusabant palàm coram populo, conferre jubebant scortatorem meretricis Sathanæque membrum, et maritum castè viventem, et liberos juxtà Dei institutionem educantem. Breviter, erat magma illo tempore in ecclesiâ occidentali turbatio, cœlum miscebatur terræ. Atque hæc discordia fecit ut multi orientali ecclesiæ accesserint.
  4. (*) Cæsar Româ reversus in concilio Moguntiæ habito, eis qui sacerdotum conjugia sublata volebant, accessit, aliis qui ei opinioni resisterent condemnatis : sic pacem in Germaniam constitutam. Espencæus, de Continentiâ, lib. I, cap. XII, ex Mutio.
  1. Fronton du Duc, Réfutation de la prétendue Vérification du sieur du Plessis, pag. 542.