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VIE DE M. BAYLE.

que ; par monsieur Bayle. À Rotterdam, chez Reinier Leers, M. DC. XCVII. Dans la préface, M. Bayle avertit d’abord que cet ouvrage n’est point celui qu’il avait promis par le Projet publié en 1692. Son premier dessein était, comme nous l’avons vu, de ne rapporter que les erreurs des dictionnaires et des autres livres, petites ou grandes ; mais, ayant appris qu’un simple recueil de fautes dégoûterait les lecteurs, et qu’on voulait de l’historique, il fut obligé d’abandonner cette entreprise. « Voici de quelle manière, dit-il, j’ai changé mon plan, pour tâcher d’attraper mieux le goût du public. J’ai divisé ma composition en deux parties : l’une est purement historique, un narré succinct des faits ; l’autre est un grand commentaire, un mélange de preuves et de discussions, où je fais entrer la censure de plusieurs fautes, et quelque fois même une tirade de réflexions philosophiques ; en un mot, assez de variété pour pouvoir croire que, par un endroit ou par un autre, chaque espèce de lecteurs trouvera ce qui l’accommode. » Il ajoute que ce changement avait rendu inutiles la plupart des matériaux qu’il avait préparés, et que c’était là une des raisons qui avaient retardé la publication de l’ouvrage. Une autre raison, c’est qu’il s’était fait une loi d’éviter avec soin toutes matières qu’on pouvait trouver dans les dictionnaires qui avaient déjà paru, ou qu’il prévoyait que l’on trouverait dans ceux que d’habiles gens promettaient. Il en usa de même à l’égard de la Bibliothéque des auteurs ecclésiastiques de M. Du Pin, et des Additions de M. Teissier aux Éloges des Hommes savans tirés de l’Histoire de M. de Thou. Il n’avait pas voulu exposer les lecteurs à la nécessité d’acheter deux fois la même chose ; mais en même temps il s’était privé de tous les matériaux les plus faciles à rassembler et à mettre en œuvre. On peut ajouter à ces raisons le changement qu’il fit dans le choix des articles. D’abord il se proposait de donner des articles réels aussi-bien que des articles personnels ; mais on lui fit connaître que ceux-là, n’étant point historiques, ne seraient pas goûtés ; ce qui le priva encore d’un grand nombre de matériaux. Cependant pour que pas laisser perdre les articles de l’Hippomanes et du Jour, qui avaient paru dans le Projet, il les mit à la fin de tout l’ouvrage, sous le titre de Dissertations. Il attribua aussi le retardement de cet ouvrage à la faiblesse de sa santé, à l’exactitude qu’il avait observée dans les citations, à la disette où il se trouvait des livres nécessaires, et aux difficultés du style, qui demande beaucoup d’attention pour éviter les équivoques, les vers, et les vicieux rapports.

Il alléguait toutes ces considérations pour répondre à ceux qui auraient pu trouver étrange qu’il eût mis plus de quatre années à la composition de ces deux volumes ; mais comme d’autres personnes pouvaient au contraire s’étonner qu’il eût pu faire dans cet espace de temps deux si gros volumes in-folio, et croire