le badinage que ces enfants viennent d’achever ; vous nous avez surprises l’habillant : votre premier mouvement est si vif ! il s’est sauvé, je me suis troublée ; l’effroi général a fait le reste.
Pourquoi n’êtes-vous pas parti ?
Monseigneur…
Je punirai ta désobéissance.
Ah, monseigneur, entendez-moi ! Toutes les fois que vous venez m’embrasser, vous savez bien que vous dites toujours : Si tu veux m’aimer, petite Fanchette, je te donnerai ce que tu voudras.
Moi ! j’ai dit cela ?
Oui, monseigneur. Au lieu de punir Chérubin, donnez-le-moi en mariage, et je vous aimerai à la folie.
Être ensorcelé par un page !
Eh bien, monsieur, à votre tour ! L’aveu de cette enfant, aussi naïf que le mien, atteste enfin deux vérités : que c’est toujours sans le vouloir si je vous cause des inquiétudes, pendant que vous épuisez tout pour augmenter et justifier les miennes.
Vous aussi, monseigneur ? Dame ! je vous la redresserai comme feu sa mère, qui est morte… Ce n’est pas pour la conséquence ; mais c’est que madame sait bien que les petites filles, quand elles sont grandes…
Il y a un mauvais génie qui tourne tout ici contre moi !
Scène VI
Monseigneur, si vous retenez nos filles, on ne pourra commencer ni la fête, ni la danse.
Vous, danser ! vous n’y pensez pas. Après votre chute de ce matin, qui vous a foulé le pied droit !
Je souffre encore un peu ; ce n’est rien. (Aux jeunes filles.) Allons, mes belles, allons !
Vous avez été fort heureux que ces couches ne fussent que du terreau bien doux !
Très heureux, sans doute ; autrement…
Puis il s’est pelotonné en tombant jusqu’en bas.
Un plus adroit, n’est-ce pas, serait resté en l’air ! (Aux jeunes filles.) Venez-vous, mesdemoiselles ?
Et, pendant ce temps, le petit page galopait sur son cheval à Séville ?
Galopait, ou marchait au pas…
Et vous aviez son brevet dans la poche ?
Assurément ; mais quelle enquête ? (Aux jeunes filles.) Allons donc, jeunes filles !
En voici une qui prétend que mon neveu futur n’est qu’un menteur.
Chérubin !… (À part.) Peste du petit fat !
Y es-tu maintenant ?
J’y suis… j’y suis… Hé ! qu’est-ce qu’il chante ?
Il ne chante pas ; il dit que c’est lui qui a sauté sur les giroflées.
Ah ! s’il le dit… cela se peut. Je ne dispute pas de ce que j’ignore.
Ainsi, vous et lui ?…
Pourquoi non ? la rage de sauter peut gagner : voyez les moutons de Panurge ! Et quand vous êtes en colère, il n’y a personne qui n’aime mieux risquer…
Comment, deux à la fois !…
On aurait sauté deux douzaines. Et qu’est-ce que cela fait, monseigneur, dès qu’il n’y a personne de blessé ? (Aux jeunes filles.) Ah çà, voulez-vous venir, ou non ?
Jouons-nous une comédie ?
Voilà le signal de la marche. À vos postes, les belles, à vos postes. Allons, Suzanne, donne-moi le bras.
Scène VII
En voit-on de plus audacieux ? (Au page.) Pour vous, monsieur le sournois, qui faites le honteux, allez vous rhabiller bien vite, et que je ne vous rencontre nulle part de la soirée.