Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/292

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M. Fal : Avez-vous un moyen de lui faire avouer devant de bons témoins qu’il tient ce trésor de Monsieur ? Sans cela, je défie qu’on puisse le lui arracher !

Figaro : S’il apprend par son Allemand ce qui se passe dans l’hôtel, il n’y rentrera plus.

Le Comte, vivement : Tant mieux ! c’est tout ce que je veux ! Ah ! qu’il garde le reste !

Figaro, vivement : Lui laisser par dépit l’héritage de vos enfants ? ce n’est pas vertu, c’est faiblesse.

Léon, fâché : Figaro !

Figaro, plus fort : Je ne m’en dédis point. (Au Comte.) Qu’obtiendra donc de vous l’attachement, si vous payez ainsi la perfidie ?

Le Comte, se fâchant : Mais l’entreprendre sans succès, c’est lui ménager un triomphe.

Scène V : Les Précédents, Suzanne.

Suzanne, à la porte, et criant : Monsieur Bégearss qui rentre ! (Elle sort.)

Scène VI : Les Précédents, excepté Suzanne.

Ils font tous un grand mouvement.

Le Comte, hors de lui : Oh ! traître !

Figaro, très vite : On ne peut plus se concerter ; mais, si vous m’écoutez, et me secondez tous pour lui donner une sécurité profonde, j’engage ma tête au succès.

M. Fal : Vous allez lui parler du portefeuille et du contrat ?

Figaro, très vite : Non pas ; il en sait trop pour l’entamer si brusquement ! il faut l’amener de plus loin à faire un aveu volontaire. (Au Comte.) Feignez de vouloir me chasser.

Le Comte, troublé : Mais, mais, sur quoi ?

Scène VII : Les Précédents, Suzanne, Bégearss.

Suzanne, accourant : Monsieur Bégeaaaaaaars ! (Elle se range près de La Comtesse. Bégearss montre une grande surprise.)

Figaro s’écrie en le voyant : Monsieur Bégearss ! (Humblement.) Eh bien ! ce n’est qu’une humiliation de plus. Puisque vous attachez à l’aveu de mes torts le pardon que je sollicite, j’espère que Monsieur ne sera pas moins généreux.

Bégearss, étonné : Qu’y a-t-il donc ? Je vous trouve assemblés !

Le Comte, brusquement : Pour chasser un sujet indigne.

Bégearss, plus surpris encore, voyant le notaire : Et Monsieur Fal ?

M. Fal, lui montrant le contrat : Voyez qu’on ne perd point de temps, tout ici concourt avec vous.

Bégearss, surpris : Ha ! ha !…

Le Comte, impatient, à Figaro : Pressez-vous ; ceci me fatigue. (Pendant cette scène, Bégearss les examine l’un après l’autre, avec la plus grande attention.)

Figaro, l’air suppliant, adressant la parole au Comte : Puisque la feinte est inutile, achevons mes tristes aveux. Oui, pour nuire à Monsieur Bégearss, je répète, avec confusion, que je me suis mis à l’épier, le suivre, et le troubler partout : (Au Comte.) car Monsieur n’avait pas sonné lorsque je suis entré chez lui, pour savoir ce qu’on y faisait du coffre aux brillants de Madame, que j’ai trouvé là tout ouvert.

Bégearss : Certes ! ouvert à mon grand regret !

Le Comte fait un mouvement inquiétant. A part : Quelle audace !

Figaro, se courbant, le tire par l’habit pour l’avertir : Ah ! mon maître !

M. Fal, effrayé : Monsieur !

Bégearss, au Comte, à part : Modérez-vous ; ou nous ne saurons rien. (Le Comte frappe du pied ; Bégearss l’examine.)

Figaro, soupirant, dit au Comte : C’est ainsi que sachant Madame enfermée avec lui pour brûler de certains papiers dont je connaissais l’importance, je vous ai fait venir subitement.

Bégearss, au Comte : Vous l’ai-je dit ? (Le Comte mord son mouchoir de fureur).

Suzanne, bas à Figaro, par derrière : Achève, achève !

Figaro : Enfin, vous voyant tous d’accord, j’avoue que j’ai fait l’impossible pour provoquer entre Madame et vous la vive explication… qui n’a pas eu la fin que j’espérais…

Le Comte, à Figaro, avec colère : Finissez-vous ce plaidoyer ?

Figaro, bien humble : Hélas ! je n’ai plus rien à dire, puisque c’est