Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/446

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Alors on reconnaîtra, dans ce tableau arithmétique, tout notre acte en peu de mots, sauf le prêt de soixante-quinze mille francs, qui dans cet acte est une véritable transaction, et le prix de ma complaisance à résilier une société qu’il m’eût été très-avantageux de conserver.

Alors je prouverai qu’avant d’entrer en procès avec l’héritier de mon bienfaiteur, toutes ces choses ont été expliquées à ce même comte Falcoz ; je prouverai que j’ai, pendant six mois, épuisé tous les bons procédés envers lui ; que je l’ai poliment invité de venir examiner à l’amiable mes titres chez mon notaire ; qu’il y a plusieurs fois amené les amis et les commis de M. Duverney ; que tous ont reconnu l’écriture du testateur dans l’acte, et dans toutes les lettres, et que tous l’ont voulu dissuader de soutenir un aussi mauvais procès.

Je prouverai que j’ai porté l’honnêteté jusqu’à engagé Me Mommet, mon notaire, qui a bien voulu s’y prêter, de présenter de ma part le titre et les lettres au conseil du comte de la Blache, assemblé ; d’y faire même proposer à ceux qui le composaient, d’être arbitres entre le comte Falcoz et moi, quoiqu’ils fussent tous ses amis ; avec offre de dissiper à leur satisfaction tous les nuages du comte légataire, et même de leur remettre mon blanc seing.

Alors il ne restera plus qu’une difficulté, qui sera de juger si la conduite de mon adversaire avec moi fut plus odieuse qu’absurde, ou plus absurde qu’odieuse. Alors on se demandera avec étonnement comment un pareil procès a pu exister dans le dix-huitième siècle, par quel genuit infernal et quel enchaînement diabolique un legs universel de quinze cent mille francs a engendré l’odieux procès des quinze mille francs, lequel a enfanté l’absurde procès des quinze louis, lequel a produit le fameux arrêt de mon blâme, lequel a fait blâmer, etc., etc., etc…

Mais, comme je vous disais, ce n’est pas de cela qu’il s’agit aujourd’hui. Nous sommes au conseil en cassation d’arrêt : n’égarons pas la question. Pour m’y renfermer de mon mieux, je me contenterai de rappeler ce que j’en ai dit à l’instant où j’obtins sur cette affaire un arrêt de soit communiqué. À défaut d’imagination, j’invoquerai ma mémoire ; et si je ne dis pas des choses neuves, au moins j’en répéterai de vraies. Triomphez, monsieur le comte, d’être inépuisable en raisonnements faux, obscurs, insidieux ; j’aime mieux en transcrire modestement un seul qui va rondement au fait que de me mouiller de sueur en écrivant pour faire sécher d’ennui le lecteur en me parcourant.

Je disais donc :

Deux questions embrassent entièrement le fond de l’affaire.

PREMIÈRE QUESTION.

L’acte du 1er avril 1770 est-il un arrête de compte, une transaction, un acte obligatoire, ou un simple acte préparatoire ?

SECONDE QUESTION.

L’acte est-il faux ou véritable ? RÉPONSE.

L’acte du 1 er avril esl un arrêté de compte définitif.

U est intitule : Compte définitif entre MM. Duverin y 1 1 de Beaumarchais.

Il e-i fait double entre les parties. Il renferme un examen, une remiseet une reconnaissance de la remise des pièces justificatives de cet arrête.

tl perte une discussion exacte de l’actif et du passif de chacun, et finit par constater irrévocablement l’état réciproque des parties, en en fixant la balance par un résultat.

Mais si cet acte esl unarrêté de compte définitif, il est aussi une transaction, et cette transaction porte sur des objets qui, pour être compris dans l’arrêté, n’en sont pas moins indépendants ; et de cette transaction, fondue dans l’arrêté, naît encore une obligation.

Puisque l’arrêté de compte esl général, qu’il transige sur divers objets ; puisqu’il oblige pour le reliquat, donc cet acte est un arrêté définitif, avec obligation et transaction ; donc c’est sous ce triple point de vue qu’on a dû le juger ; donc la déclaration de 1733 n’y esl nullement applicable ; donc l’arrêt qui l’a déclaré nul sans qu’il fût besoin de lettres de rescision « luit être réformé. D’après ce qui vient d’être dit, la seconde question : l’acte est-il faux ou » < ritablt ? n’est plu-, dans l’espèce présente, qu’un tissu d’absurdités dont voici le tableau :

Si l’acte n’est pas souscrit par M. Duverney. à propos de quoi présentiez-vous à juger si ecl acte est un arrête, une transaction, un compte définitif, ou seulement un acte préparatoire ? pourquoi demandiez-vous un entérinement delettres de rescision ? Il fallait, contre un acte faux, vous pourvoir par la voie de l’inscription de faux : je vous y ai provoqué de toutes les manières, vous vous en êtes bien gardé.

El si l’acte est daté et signé par M. Duverney, nous voilà rentrés dans la première question, laquelle exelul absolument la seconde. Or il s’agit ici de l’arrêt : on n’a pas pu regarder l’acte comme faux, puisqu’on présentait à juger la proposition précisément contraire ; (’est à savoir si un <t>, passéentre majeurs doit être exécuté. Donc l’arrêl n’a pas pu le rejeter en entier, ni l’annuler sans qu’il fût besoin de lettres de rescision ; donc l’arrêl doit être réformé. Mon adversaire, tournant sans cesse dans le