Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/696

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arrêté que les vues de M. le maréchal, très-avantageuses au Théâtre-Français, méritaient la plus grande reconnaissance des gens de lettres, et la plus sérieuse application à former le nouveau règlement théâtral sur un plan sage et modéré, tel enfin qu’il était désiré par M. le maréchal de Duras et par nous tous.

Chacun offrit de communiquer ses idées par écrit : mais, comme la rédaction de tous ces matériaux et le soin de les faire adopter exigeaient plutôt le travail suivi d’un seul homme ou de peu de personnes, que le concours d’une assemblée nombreuse, il fut arrêté d’en confier le soin à plusieurs d’entre nous, qui en rendraient compte à tous les auteurs dans des assemblées semblables à celle qui venait de réunir nos intérêts et nos vues. Il en fut sur-le-champ dressé une délibération signée de tous, et conçue en ces termes :

ii Aujourd’hui 3 juillet 1777, nous soussignés, ■’étant assemblés sur l’invitation de M. de Beaumarchais, en raison de ce qui suit : Il nous a présenté une lettre de M. le maréchal de Duras, à lui écrite en date du l.’i juin 1777, annexée à i présente délibération, ainsi que la réponse qu’il y a faite ; et nous a rendu compte de la conversation qui s’en est suivie entre M. le maréchal et lui, et des intentions dans lesquelles il a trouvé MM. les premiers gentilshommes de la chambre, de faire un nouveau règlement à la Comédie française, relatif aux gens de lettres qui se sont consacrés à ce Ile àtre. prc— avoir délibéré sur toutes les questions agitées dans la présente assemblée, nous avons arrêté ce qui suit, savoir : que

« Nous avons prié et prions M. de Beaumarchais de nous représenter comme commissaire et représentant perpétuel nommé par nous pour suivre l’affaire présente et tous autres événements qu’elle peut embrasser par la suite, tant auprès de MM. les premiers gentilshommes de la chambre, que de toutes autres personnes qui pourraient y influer ; discuter nos intérêts, nous rendre compte de ses travaux, recevoir nos observations, les rédiger ; et enfin porter le vœu gi ni rai de tous nous autres gens de lettres partout mi nos intérêts l’exigeront : et, pour partager entre plusieurs le fardeau de tous ces — —, nous avons prié et prions MM. Saurin, de I(i montel cl Sedaine, de se joindre à lui en mêmes qualités de nos commissaires et représentants perpétuels ; et, en cas de longue absence de l’un de nos susdits commissaires et représentants perpétuels, pour cause d’affaires ou de maladie, nous avons arrêté que nous nommerons à sa réquisition, dans une assemblée à ce sujet, l’un de nous pour le suppléer. Quant à ce qui regarde les auteurs dramatiques avoués par notre dite assemblée, et qui n’ont pu se trouver et signera la présente délibération, nous avons arrêté qu’ils seront invités d’en prendre lecture, d’y faire leurs observations, et d’y donner leur adhésion.

ci N’entendons, par la dénomination d’auteurs dramatiques ayant droit d’avis et voix délibérative entre nous, que les auteurs qui ont une ou plusieurs pièces représentées à la Comédie française ; et nous convenons de n’admettre à délibérer désormais avec nous que les auteurs dramatiques qui seront dans le même cas expliqué ci-dessus.

|| Ont signé : Rochon de Chabannes, Lemierre, la « Place, Chamfort, Bref de Sauvigny, Dlin de ci Sainmore, Gudin de lu Brencllcrie. du Loyer, « Lefévre, Ducis, Favart, Dorât, Lemonni. •i Cailhava, Leblanc, Barthe, Rousseau. Plus bas est écrit : « Et nous quatre, commissaires honorés de la nomination de la présente assemblée, avons accepté et signé la présente délibération.

i. Saurin, Muni’util, Sedaine, Caron d> Beaumarchais. ■

Voilà donc l’affaire absolument dénaturée : il ne s’agit plus d’un compte que je demandais aux comédiens, et que je n’ai pu obtenir après un an de soins et de patience ; aujourd’hui c’est lin code mi règlement nouveau proposé, par lequel les auteurs, dégagés du soin de compter, c’est-à-dire de disputer sans cesse et sans fruit avec les comédiens, doivent avoir un sort décent, équitable, enfin indépendant.

Le plan de M. le maréchal de Duras est que l’on forme d’abord une somme fixe, équivalente au cinquième de la recette, et qu’elle soit touchée, chaque représentation, par l’auteur d’une pièce nouvelle, sans autre déliât que d’aller recevoir cette somme autant de fois que la pièce ne sei i pas tombée dans les règles, c’est-à-dire, tant que la i, ci tte entière du spectacle ne sera pas tonifiée deux fois de suite au-dessous de don/’.’cents livres. Le veste était abandonné à la prudence des auteurs. Les différents travaux furent répartis entre tous les membres de l’assemblée ; les commissaires chargés de les rédigée et mettre en œuvre y travaillèrent avec tant de suite et de zèle, qu’on fut en état dès le 23 juillet (c’est-à-dire, au bout de trois semaines de proposer à M. le maréchal de Duras la communication du plan général que la société des auteurs avait embrassé. Les comédiens, effrayés de voir les auteurs s’assembler et travailler sérieusemenl à un projet de règlement pour le théâtre, se récrièrent hauteineni contre la forme et le fond d’une chose qu’ils ne connaissaient pas encore : on les livrait, disaient-ils, aux auteurs, qui en allumeraient pour les ruiner et perdre la Comédie.