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fort affligée, retourna à son palais. Elle voulut gronder Fortuné pour l’obliger à mieux faire ; mais, au lieu de lui promettre de se corriger, il dit que, si on le chagrinait, il se laisserait mourir de faim. Alors la reine, toute effrayée, le prit sur ses genoux, le baisa, lui donna des bonbons, et lui dit qu’il n’étudierait pas de huit jours, s’il voulait bien manger comme à son ordinaire. Cependant le prince Fatal était un prodige de science et de douceur ; il s’était tellement accoutumé à être contredit qu’il n’avait point de volonté, et ne s’attachait qu’à prévenir les caprices de Fortuné. Mais ce méchant enfant qui enrageait de le voir plus habile que lui, ne pouvait le souffrir ; et les gouverneurs, pour plaire à leur jeune maître, battaient à tous momens Fatal. Enfin, ce méchant enfant dit à la reine qu’il ne voulait plus voir Fatal, et qu’il ne mangerait pas qu’on ne l’eût chassé du palais. Voilà donc Fatal dans la rue, et, comme on avait peur de déplaire au