Page:Beaumont - Contes moraux, tome 1, Barba, 1806.djvu/47

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voyait pas les yeux. Sur les dix heures du matin, on entendit un carrosse s’arrêter devant la porte ; mais au lieu d’Ingénu, on en vit descendre le roi Fourbin : un des courtisans, qui étaient à la chasse avec le prince, avait dit au roi que son frère avait rencontré la plus belle fille du monde, et qu’il voulait l’épouser.

« Vous êtes bien hardi de vouloir vous marier sans ma permission, dit Fourbin à son frère : pour vous punir, je veux épouser cette fille, si elle est aussi belle qu’on le dit. »

Fourbin, en entrant chez la bergère, lui demanda où était la fille.

« La voici, répondit la bergère, en montrant Aurore.

— Quoi ! ce monstre-là, dit le roi, et n’avez-vous point une autre fille, à laquelle mon frère a donné sa bague ?

— La voici à mon doigt », répondit Aurore.

À ces mots, le roi fit un grand éclat de rire, et dit :

« Je ne croyais pas mon frère de si mauvais goût ; mais je suis charmé de pouvoir le punir. »

En même temps, il commanda à la bergère de mettre un voile sur la tête d’Aurore ; et