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assemblées dont elle était priée. Malheureusement pour elle, son père mourut quand elle n’avait que douze ans ; et personne ne lui faisant plus honte de son défaut, elle prit une telle habitude de rapporter, qu’elle le faisait même sans y penser : elle passait toute la journée à espionner les domestiques qui la haïssaient comme la mort ; si elle était dans un jardin, elle faisait semblant de dormir pour entendre les discours de ceux qui se promenaient. Mais comme plusieurs parlaient à la fois, et qu’elle n’avait pas assez de mémoire pour retenir ce que l’on disait, elle faisait dire aux uns ce que les autres avaient dit ; elle écrivait le commencement d’un discours, sans en entendre la fin, ou la fin, sans en savoir le commencement. Il n’y avait pas de semaine qu’il n’y eût vingt tracasseries, ou querelles dans la ville, et quand on venait à examiner d’où venaient ces bruits, on découvrait que cela provenait des rapports de Joliette. Elle brouilla sa