Page:Beckford - Vathek, éd. Mallarmé, 1893.djvu/146

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dans ces déserts de sable, pendant que je puis me rafraîchir dans l’heureuse vallée des melons et des concombres ? Que maudit soit le Giaour avec son portail d’ébène ! Il m’a fait assez morfondre ; d’ailleurs, qui me donnera des lois ? Je ne dois entrer chez personne, dit-on ; eh ! puis-je entrer dans quelque lieu qui ne m’appartienne ? Bababalouk, qui ne perdait pas une parole de ce soliloque, y applaudissait de tout son cœur, et toutes les dames furent de son avis ; ce qui jusqu’alors n’était pas arrivé. On fêta les nains, on les caressa, on les mit bien proprement sur de petits carreaux de satin, on admira la symétrie de leurs petits corps, on voulait tout voir, on leur présenta des breloques et du bonbon ; mais ils refusèrent tout avec une gravité admirable. Ils grimpèrent sur l’estrade du Calife, et, se plaçant sur ses épaules, ils lui bourdonnèrent des prières dans les deux oreilles. Leurs petites langues allaient comme les feuilles du tremble, et la patience de Vathek touchait à sa fin, quand les accla-