Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

situation d’esprit, & se fit aussi-tôt apporter les sabres merveilleux. Afin de n’être pas ébloui par leur éclat, il les regarda au travers d’un verre coloré, & s’efforça d’en déchiffrer les caractères ; mais ce fut en vain : il eut beau se frapper le front, il ne connut pas une seule lettre. Ce contretems l’auroit fait retomber dans ses premières fureurs, si Carathis n’étoit entrée à propos.

Prenez patience, mon fils, lui dit-elle ; vous possédez assurément toutes les sciences. Connoître les langues est une bagatelle du ressort des pédans. Promettez des récompenses dignes de vous à ceux qui expliqueront ces mots barbares que vous n’entendez pas, & qu’il est au-dessous de vous d’entendre ; bientôt vous serez satisfait. Cela peut être, dit le Calife ; mais en attendant je serai excédé par une foule de demi-savans, qui feront cet essai autant pour avoir le plaisir de bavarder, que pour obtenir la récompense. Après un moment de reflexion, il ajouta ; je veux éviter cet inconvénient. Je ferai mourir tous ceux qui ne me satisferont pas ; car, graces au Ciel, j’ai assez de jugement pour voir si l’on traduit, ou si l’on invente.

Oh ! pour cela, je n’en doute pas, répondit Carathis. Mais faire mourir les ignorans est une