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VATHEK,

loisir pour vaquer à vos prières ; ce pays m’abîme la santé, je veux changer d’air ; la montagne aux quatre sources m’ennuie, il faut que je boive du ruisseau de Rocnabad23, & me rafraîchisse dans les beaux vallons qu’il arrose. En mon absence vous gouvernerez mes états, d’après les conseils de ma mère24, & aurez soin de lui fournir tout ce qu’elle desirera pour ses expériences ; car vous savez bien que notre tour est remplie de choses précieuses pour les sciences.

La tour n’étoit guères du goût de Morakanabad ; sa construction avoit épuisé des trésors prodigieux, & il n’y avoit vu porter que des négresses, des muets & de vilaines drogues. Il ne savoit non plus que penser de Carathis, qui prenoit toutes les couleurs comme le caméléon. Sa maudite éloquence avoit souvent mis le pauvre Musulman aux abois ; mais si elle ne valoit pas grand’chose, son fils étoit encore pire, & il se réjouissoit d’en être délivré. Il alla donc calmer le peuple, & préparer tout pour le voyage de son maître.

Vathek, dans l’espoir de plaire davantage aux esprits du palais souterrein, vouloit que son voyage fût d’une magnificence inoiue. Pour cet effet il confisqua à droite & à gauche les biens de ses sujets, pendant que sa digne mère visitoit les