Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/247

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Bulgares et tant de peuples maudits, les Romains et ceux de la Pouille et tous ceux de Palerne, ceux d’Afrique et de Califerne […] Qui conduira aussi puissamment mes armées, quand il est mort, celui qui toujours nous guidait ? Ah ! France, comme tu restes désolée ! Mon deuil est si grand, je voudrais ne plus être ! » Il tire sa barbe blanche, de ses deux mains arrache les cheveux de sa tête. Cent mille Français se pâment contre terre.

CCX

« Ami Roland, que Dieu te fasse merci ! Que ton âme soit mise en paradis ! Celui qui t’a tué, c’est la France qu’il a jetée dans la détresse !… J’ai si grand deuil, je voudrais ne plus vivre ! Ô mes chevaliers, qui êtes morts pour moi ! Puisse Dieu, le fils de sainte Marie, accorder que mon âme, avant que j’atteigne les maîtres ports de Cize, se sépare en ce jour même de mon corps et qu’elle soit placée auprès de leurs âmes et que ma chair soit enterrée auprès d’eux ! » Il pleure, tire sa barbe blanche. Et le duc Naimes dit : « Grande est l’angoisse de Charles ! »

CCXI

« Sire empereur », dit Geoffroi d’Anjou, « ne vous livrez pas si entièrement à cette douleur ! Partout le champ faites rechercher les nôtres,