Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/331

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me suis cru, à tort ou à raison, en présence d’accidents de plume, de distractions ou d’erreurs du copiste. La liste, au premier regard, en paraîtra bien longue. Mais un bon nombre des remarques qui suivent ont un caractère purement descriptif : elles signalent les fréquents « repentirs » du copiste, elles indiquent que dans tel mot telle lettre est mal formée ou effacée, qu’on peut en tel cas hésiter entre deux lectures, etc. Ou bien elles renseignent sur les méfaits d’une seconde main (et peut-être d’une troisième). Dès le XIIe siècle ou le XIIIe, des leçons écrites par le premier copiste ont été grattées, et, 70 fois environ, on leur a substitué par conjecture d’autres leçons. Notre relevé montre le peu d’autorité de ces retouches : plus de 50 d’entre elles ont été faites à contre-temps et à contre-sens, ce qui doit inspirer à l’égard des vingt autres, même quand elles semblent judicieuses, une légitime méfiance.

Mes autres notes offrent le recensement complet des leçons du manuscrit que j’ai écartées les tenant pour fautives. Je suis intervenu le moins souvent que j’ai pu, et la plupart des critiques m’en feront reproche, je le sais. Je crains tout au contraire de n’avoir été que trop enclin à appeler « fautes » maintes leçons que d’autres sauront peu à peu justifier, à mesure qu’on aura mieux étudié, dans les manuscrits du XIIe siècle, les particularités du français qui se parlait et s’écrivait en Angleterre autour du scribe d’Oxford. Je tiens de Quintilien un précepte excellent, et donc méconnu (de moi tout le premier) : In veteribus libris reperta mutare imperiti solent, et dum librariorum insectari volunt inscientiam, uam confitentur.



À la première page du manuscrit, l’écriture est effacée en plusieurs lieux, surtout dans les mots ci-après relevés (les lettres entre crochets sont celles qui sont devenues tout à fait ou presque illisibles) : 1 magne[s], 2 Espaig[ne],