Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/160

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

timidement les yeux sur le long personnage dont les talons illustraient le bord de la cheminée, et qui expectorait, de droite à gauche, avec une intrépidité des plus alarmantes pour les gens nerveux et à préjugés.

« Hé ! comment vous va, mon cher ? dit le susdit gentilhomme, lançant, par manière de salut, une formidable effusion de jus de tabac du côté du nouvel arrivant.

— Pas mal, répliqua l’autre, esquivant avec effroi l’honneur qui le menaçait.

— Quelle nouvelle ? dit le notable, tirant de sa poche une carotte de tabac et un grand couteau de chasse.

— Aucune, que je sache.

— Une chique ?… hein ? reprit le premier ; et il tendit au voyageur une tranche de tabac, d’un air tout à fait fraternel.

— Non, merci ; cela m’est contraire, répondit le petit homme en s’effaçant.

— Contraire ? ah ! » dit l’autre avec insouciance ; et il enfonça le morceau dans sa bouche, afin d’alimenter le jet incessant qu’il lançait pour le bien général de la société.

Le vieux monsieur tressaillait chaque fois que son voisin aux longues jambes faisait feu dans sa direction ; ce dernier s’en aperçut, et, tournant avec condescendance son artillerie sur un autre point, il livra un assaut désespéré à l’un des chenets, avec une justesse de coup d’œil et une précision stratégique qui eussent suffi à la prise d’une ville.

« Qu’est-ce que c’est ? demanda le petit vieux en voyant plusieurs personnes se grouper autour d’une grande affiche.

— Le signalement d’un nègre, » dit quelqu’un brièvement.

M. Wilson, c’est le nom du vieux gentilhomme, se leva, et après avoir rangé sa valise et son parapluie, il