Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/457

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— J’appartenais à la famille Saint-Clair, reprit Adolphe avec orgueil.

— Vrai !… Moi vouloir être pendu si eux pas contents se débarrasser de vous ! Une chance, quoi ! Peut-être bien vous va être troqué contre un lot de pots cassés et vieilles théières fêlées ! » dit Sambo, avec une provocante grimace.

Adolphe, poussé à bout par ces railleries, s’élança sur son adversaire, jurant et le frappant à tour de bras. Les autres riaient, applaudissaient : le tumulte attira le gardien.

« Qu’y a-t-il, garçons ? À l’ordre ! à l’ordre ! » dit-il comme il entrait, en faisant claquer son long fouet.

Tous s’enfuirent de différents côtés, excepté Sambo ; enhardi par la faveur dont il jouissait comme bouffon en titre, il maintint son terrain, faisant un plongeon de la tête avec une facétieuse grimace, toutes les fois que le gardien arrivait sur lui.

« Seigneur maître, c’est pas être nous ; — nous bien tranquilles ; — c’est nouveaux venus, là ; — être méchants, colères ! — toujours après pauv’ monde ! »

Sur ce, le gardien se tourna vers Tom et Adolphe, distribua, sans plus d’enquête, quelques coups de pieds et de poings ; et, après une recommandation générale d’être bons enfants et de dormir, il s’en alla.

Tandis que cette scène se passait au dortoir des hommes, jetons un coup d’œil dans l’appartement des femmes. Là, étendues sur le plancher, gisent, en diverses attitudes, d’innombrables créatures endormies, de toutes couleurs, depuis le noir d’ébène jusqu’au blanc de l’ivoire, de tout âge, depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse. Ici, c’est une belle fille de dix ans, dont la mère a été vendue hier, et qui a tant pleuré, sans que personne prit garde à elle, qu’elle a fini par s’endormir. Là, c’est une vieille négresse usée, dont les bras amaigris, les doigts rugueux témoignent de durs travaux : article