Page:Belon - L’histoire naturelle des estranges poissons marins.djvu/42

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par erreur, s’estant picqué du susdict aguillon en tumbant dessus & rencontrant l’espine qu’il se ficha dedens le corps. Lesquelles choses sont dicts sans consideration, qui sentent plus la fable que quelque apparẽce de verité. Ie ne nie pas qu’il ne puisse estre vray, touchant son amour & celle du petit garson de Iasso : mais il ne peult estre vray qu’il y ait un aguillon sur son dos, car Aristote n’en ha onc parlé & luy qui en ha escript si amplement, ne l’eust pas laissé en arriere, s’il y en eust eu quelqu’un : & aussi que l’experience en fait foy, veu mesmement qu’en une telle difficulté, l’œil en peult donner certificatiõ quãd lon ha la chose devant soy. Ie ne puis aussi convenir avec plusieurs qui ont escript que les Daulphins saultants par la mer, font un presage annonceant la tempeste advenir. Ceci soit dict saulvant l’honneur de ceuls a qui il est deu. Mais il me semble qu’ils se sont trompez en ce cas la. Car i’ay expressement observe maintes fois en plusieurs voyages, que les Daulphins alloient aussi bien avec le vent, que contre le vent, & qu’ils se monstroient aussi bien quãd la mer est esmeue en tempeste, que quand elle est tranquille & sans vent, chose qui appert quand les Daulphins se monstrent en l’air pour respirer hors l’eaue, laquelle chose ils fõt aussi bien apres le mauvais tẽps, que durant la tempeste, & semblablement aussi bien devãt comme apres, car les Daulphins ne peuvent vivre en la mer sans respirer.

XXXIIII.

Qu’il soit vray que les Daulphins aydent grandement aus pescheurs qui peschent a la traine.

QUant aus autres histoires fabuleuses qui ont esté recitees des Daulphins, ie n’en eusse pas escript un mot, si ie ne les avoye ouy n’a gueres racõpter en Grece. Car le commun peuple en retient encore pour le iourd’huy plusieurs qui ont esté anciennement racõptees, & qu’on trouve maintenant escriptes. Et touchant celle qui a esté dicte, qu’ils donnent grand secours a ceuls qui peschent le poisson, & qu’il leur aydent a le mettre dedens les rets, & en recompanse qu’ils participent du butin qui est departy entre euls. Quant au premier, ie trouve bien qu’il soit vray semblable, mais (comme ie diray cy apres) cela adviẽt