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GRANDGOUJON

— Il porte bien son nom : tous les jours il découvre quelque chose. Il a commencé par faire du droit à trente-cinq ans !

— Quarante.

— Quarante !… Mon âge !… Et dans quel but ? Explique, vieux.

— Oh ! Madame, reprit Colomb, croisant ses maigres jambes, aplatissant sa cravate, dressant la tête, depuis toujours je sentais venir la guerre.

— Prodigieux ! fit Grandgoujon. Alors ?

— Je la préparais.

— C’est inouï !… Ah ! cette joie de se retrouver !

Il lui souriait avec attendrissement, et semblait dire :

— Voilà un homme méconnu. Comment n’est-il pas au premier rang de la société ?

Mais Colomb ne le regardait pas.

— Madame, reprit-il, je voulais être prêt : je le fus. La France a manqué périr : elle est sauvée.

Grandgoujon songeait à Madame des Sablons. Il fit :

— Très bien !

Puis, de satisfaction, il croisa les mains sur son ventre.

— Seulement, dit Colomb, il faut l’union des esprits.

— Bravo ! dit Grandgoujon. Leur appartement est délicieux : quand on pense que c’est le même que le nôtre ! Mais… je t’interromps : pardon ! Continue. C’est tellement vrai ce que tu dis là !

— Il faut, reprit Colomb, après un silence,