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LA MORT D’ACHILLE.

De plus ſon mal s’aigrit en telle violence,
Que qui le veut guerir ſe ruyne, & l’offence,
Et l’on doit pour complaire à ſes feux diſſolus
Dire qu’il eſt bien ſain quand il ſouffre le plus.
Je ne luy diray mot, mais außy cette lettre
Qu’en partant Briſeide en mes mains vient de mettre,
Ou peut-eſtre elle taſche à l’attirer à ſoy,
Luy parlera ſans doute, & pour elle, & pour moy :
Par là je l’avertis du danger qui le preſſe,
C’eſt la voix d’Alcimede, & la voix de la Grece !
Je le deſgageray de ces foibles appas,
Et luy remonſtreray meſme en ne parlant pas.



Scène quatrieſme

ACHILLE, POLIXENE.
Une chambre paroiſt, & Achille aux pieds de Polixene qui luy preſente ſon eſpée nuë.
Achille.


Non, Madame, achevez mon deſtin miſerable,
Vangez-vous, perdez-moy par un coup favorable,
Qui retarde l’effort de voſtre belle main ?
Eſt-ce pitié, foibleſſe, injustice, ou deſdain ?
J’ay choiſi ce ſupplice, en ſongez-vous un autre ?
Eſpargnez-vous mon ſang ? j’ay tant verſé du voſtre.