Page:Benson - Le Maître de la terre.djvu/272

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il pressa le bouton de la lumière électrique, et Mabel se retourna lentement vers lui. Elle était vêtue de sa robe de ville, un manteau jeté sur les épaules. Son visage était presque celui d’une étrangère, absolument décoloré, avec les lèvres serrées, et les yeux remplis d’une émotion indéfinissable, colère ou terreur, ou angoisse, ou peut-être tout cela à la fois.

Ainsi elle se tenait, dans la lumière de la fenêtre, immobile, le regardant.

Pendant une minute, Olivier n’osa point parler. Il se dirigea vers la fenêtre, la referma, et ramena les rideaux. Puis, doucement, il prit par un bras la forme raidie.

— Mabel, dit-il, Mabel !

Elle se laissa entraîner vers le sofa, mais sans répondre à son contact. Il s’assit près d’elle et la considéra, avec une sorte d’appréhension désespérée.

— Ma chérie ! dit-il, je suis anéanti !

Elle continuait à le regarder. Il y avait, dans sa pose, cette rigidité que simulent les acteurs : mais il savait trop que, chez sa femme, il ne s’agissait pas de simulation. Une ou deux fois déjà, précédemment, il avait observé chez elle une expression analogue, sous l’effet d’une horreur intense : une fois, en particulier, elle avait eu cette expression en découvrant une tache de sang sur son soulier.

Parmi le silence de la chambre, de nouveau, il entendit le grondement étouffé de la foule invisible qui faisait tumulte, dans les rues voisines.