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« Je me rappelle le temps où nous buvions l’hydromel dans la salle et où nous promettions à notre roi de reconnaître sa générosité si l’occasion s’en présentait un jour. C’est lui qui nous a choisis dans l’armée pour effectuer cette entreprise, c’est lui qui nous a exhortés à la valeur et m’a donné ces objets de prix ; il nous tenait pour de bons guerriers, mais il a voulu accomplir seul cette prouesse, parce que plus qu’aucun autre homme il a fait des actions d’éclat et des coups hardis. Maintenant le jour est venu où notre seigneur a besoin de la force de bons guerriers ; secourons notre roi pendant le temps que durera la flamme meurtrière ! Dieu sait que je préfère de beaucoup voir mon corps entouré par la flamme à abandonner mon souverain dans la nécessité. Il ne me semble pas convenable que nous reportions nos boucliers dans nos maisons sans avoir tué l’ennemi et défendu la vie du prince des Wederas. Un si brave guerrier a droit à être secouru dans l’infortune : c’est pourquoi je vais aller affronter avec lui le combat. »

Il se rendit alors, à travers la fumée, au secours de son roi, auquel il adressa ces quelques paroles :

« Cher Beowulf, bats-toi avec courage ! souviens-toi de ce que tu disais dans ta jeunesse, de la promesse que tu as faite de ne pas laisser chanceler ton honneur parmi les hommes ; résiste de toute ta force ; je t’aiderai dans cette tâche. »

Après ces paroles le dragon revint courroucé et couvert d’ondes flamboyantes à la rencontre des ennemis. La flamme consuma le bouclier de Wiglaf. La cotte de mailles ne pouvait secourir le jeune guerrier, aussi s’empressa-t-il de se mettre à couvert sous le bouclier de son parent. Le roi, se souvenant de sa valeur et de sa force, frappa de nouveau avec son épée ; l’épée resta fixée sur la tête du dragon : Nægling se fendit, la vieille épée refusa le service dans le combat. Le sort ne voulait pas que les épées pussent l’aider à la guerre ; sa main avait trop de