Page:Beowulf et les premiers fragments épiques anglo-saxons, trad. Thomas, 1919.djvu/64

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le tenait [ferme] par la main ; chacun vivant était
odieux à l’autre. Il reçut[1] une blessure de corps,
l’être monstrueux terrible ; sur son épaule se produisit
évidente une plaie perpétuelle ; [ses] tendons sautèrent,
les chairs[2] éclatèrent. À Beowulf fut accordée
la gloire du combat ; de là Grendel dut
820 s’enfuir, mortellement atteint, sous les pentes marécageuses,
aller chercher sans joie [son] habitation ; il savait trop bien[3]
que la fin de ses jours était arrivée,
le chiffre journalier de ses journées. Pour tous les Danois
après cet assaut de carnage le désir était accompli.
Lors il avait purifié, lui qui avant vint de loin,
circonspect au cœur fort, la salle de Hrothgar,
et [l’avait] préservée contre l’attaque ; il se réjouit de son œuvre
de nuit, de son exploit intrépide. Pour les Danois de l’Est
il avait exécuté, lui, le cacique des gens Géates, [sa] vanterie,
830 il avait aussi porté remède à toute la détresse,
au chagrin [provenant] de l’être hostile, qu’ils enduraient avant
et qu’ils devaient supporter par affreuse nécessité,
humiliation non médiocre. C’en fut une preuve évidente
quand le brave guerrier déposa la main,
le bras et l’épaule (il y avait là tout ensemble
la serre[4] de Grendel) sous le toit spacieux.


XIII.


Lors il y eut le matin, à ce que j’ai appris,
autour de la grand’salle aux dons maint combattant ;
les conducteurs de peuple se mirent en route de loin et de près
840 sur les grands chemins pour observer la merveille,
les traces de l’adversaire odieux. Son départ de la vie
ne sembla lamentable à aucun des hommes
qui observaient la piste de l’[être] sans gloire,
[et] comment las d’humeur, partant de là,
vaincu dans l’attaque, vers l’onde des monstres de mer,
voué à la mort et mis en fuite, il laissa des traces vives.
Là le courant marin bouillonnait de sang,
le terrible remous des vagues tout mêlé
de sang frais et chaud, bouillonnait du sang des flamberges ;
850 l’[être] voué à la mort [le] teignait, après que, dépourvu de joies,
il déposa l’existence dans la paix des marécages,

  1. Mot à mot : il souffrit.
  2. Mot à mot : les couvertures des os.
  3. Mot à mot : d’autant mieux.
  4. Mot à mot : l’étreinte.