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II

ANATOLE FRANCE


Anatole France, à cette époque, n’était pas encore l’écrivain illustre promu par un plébiscite à la charge dignitaire de prince des prosateurs français. Il ne se prévalait que de vers, et ses Poèmes dorés, recueil charmant, lui promettaient déjà une place, auprès d’André Chénier, sur les bancs de gazon du Parnasse. Sa lyre aujourd’hui y repose, détendue. Oh ! la méchante vie que la nôtre, qui nous vend le pain au prix d’apostasie !

Personne, crois-je, n’ignore que ce nom de : France est un pseudonyme et que, s’il l’arbore à l’Académie, le maître, à l’état civil, signe : Thibault, comme son père, brave éditeur bibliophile du quai aux bouquins, ou Malaquais. Pour quelle raison Anatole renonça-t-il dès les débuts à sa patronymie, il nous le dira s’il veut nous le dire, et peu importe. Mais il serait amusant qu’un libraire se fût opposé à la vocation d’un faiseur de livres, et, quand je m’ennuie, j’en rêve le paradoxe.