Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

domptée et refoulée mais toujours couvant sous les cendres de l’âme, que n’eussent fait plaintes et discours. Il prenait toute sa portée de ce fait qu’elle s’était remariée à cœur fermé, pour donner un beau-père à sa fille, avec un vague citoyen de Dourdan, assez riche, mais paralysé d’un bras et déjà père de deux enfants lui-même, mariage de raison s’il en fut, selon Scribe, et dans toute l’horreur d’une association d’intérêts. Elle n’en eut d’ailleurs aucune postérité.

Il avait une charge de facteur aux farines à la Halle aux blés, et servait d’intermédiaire entre les gros meuniers et les boulangers de la ville. Mais c’était Flore Morel qui faisait toute sa besogne. Les lunettes sur le nez et la tabatière sous la main, elle dictait ses lois aux forts de la Halle, soumis à la volonté de ce bout de femme aux yeux de gazelle qui les subjuguait par sa gaieté et qui n’aimait plus personne.

Or, ces choses se passaient au temps où il y avait une bourgeoisie française, fière, libérale et consciente de sa force et de son rôle.