Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 4, 1913.djvu/148

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les bons ouvriers, tous les êtres que ravit une idée ouvrant ses ailes, tous ceux à qui plaît un travail fait de main d’ouvrier, enfin toute cette glorieuse élite, plus nombreuse qu’on ne se l’imagine, qui, où qu’elle soit répandue et dispersée, emporte en elle l’âme divine de Paris. » — Théodore de Banville, préface d’Enguerrande.


Quand on reçoit, vivant, sur l’occiput, et d’une telle main de gloire, la charretée de toutes les fleurs de la fête-Dieu littéraire, il ne reste plus qu’à se retirer à la campagne et à y briguer l’écharpe rurale de maire de son village, car on est perdu pour la capitale. La préface d’Enguerrande faillit m’abattre net et du coup. On m’évitait sur les boulevards et je n’osais plus traverser le passage du Pinde, ou de Choiseul, de peur d’être reconduit, comme mon Alphonse XII lui-même, par les camarades de lyre du potinoir de Lemerre. François Coppée, le plus bienveillant d’entre eux, resta quinze ans, il me l’a avoué lui-même, sans lire le poème, ni même en couper les pages. — Je ne pouvais m’y décider, me disait-il, par affection pour vous, autant que par respect pour Banville du reste. Un jour, dans les bureaux du Temps, mon confrère en chronique, Henri Fouquier, à qui l’éditeur avait fait l’hommage d’un exemplaire de l’ouvrage, me jeta, sous ses lunettes, un regard si explicite que je ne pus me tenir de tout lui avouer. — Oui, fis-je, on fait courir le bruit que Théodore de Banville est incorruptible comme Robespierre. C’est une erreur. Propagez-la, Fouquier, mais n’y croyez pas. Le poète des Odes Funambulesques n’a de riche que la rime. Je l’ai eu