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CHAPITRE III
De l’organisation des états de conscience.
La liberté

Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi la question de la liberté met aux prises ces deux systèmes opposés de la nature, mécanisme et dynamisme. Le dynamisme part de l’idée d’activité volontaire, fournie par la conscience, et arrive à la représentation de l’inertie en vidant peu à peu cette idée : il conçoit donc sans peine une force libre d’un côté, et de l’autre une matière gouvernée par des lois. Mais le mécanisme suit la marche inverse. Les matériaux dont il opère la synthèse, il les suppose régis par des lois nécessaires, et bien qu’il aboutisse à des combinaisons de plus en plus riches, de plus en plus malaisées à prévoir, de plus en plus contingentes cri apparence, il ne sort pas du cercle étroit de la nécessité, où il s’était enfermé d’abord. — En approfondissant ces deux conceptions de la nature, on verrait qu’elles impliquent deux hypothèses assez différentes sur les rapports de la loi avec le fait qu’elle régit. A mesure qu’il élève plus haut ses regards, le dynamiste croit apercevoir des faits qui se dérobent davantage à l’étreinte des lois : il érige donc le fait en réalité absolue, et la loi en expression plus ou moins symbolique de cette réalité. Au contraire, le mécanisme démêle au sein du fait particulier un certain nombre de lois dont celui-ci constituerait, en quelque