Page:Bergson - Le Rire.djvu/39

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d’un vaudevilliste, et qu’on rit bien moins alors des dessins eux-mêmes que de la satire ou de la scène de comédie qu’on y trouve représentée. Mais si l’on s’attache au dessin avec la ferme volonté de ne penser qu’au dessin, on trouvera, croyons-nous, que le dessin est généralement comique en proportion de la netteté, et aussi de la discrétion, avec lesquelles il nous fait voir dans l’homme un pantin articulé. Il faut que cette suggestion soit nette, et que nous apercevions clairement, comme par transparence, un mécanisme démontable à l’intérieur de la personne. Mais il faut aussi que la suggestion soit discrète, et que l’ensemble de la personne, où chaque membre a été raidi en pièce mécanique, continue à nous donner l’impression d’un être qui vit. L’effet comique est d’autant plus saisissant, l’art du dessinateur est d’autant plus consommé, que ces deux images, celle d’une personne et celle d’une mécanique, sont plus exactement insérées l’une dans l’autre. Et l’originalité d’un dessinateur comique pourrait se définir par le genre particulier de vie qu’il communique à un simple pantin.