Page:Berlioz - Correspondance inédite, 1879, 2e éd. Bernard.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le félicitait d’avoir composé de si jolies petites romances[1].

Hector n’avait pas quitté Paris sans regret ; il y laissait une personne dont il crut avoir à se plaindre et dont il voulut se venger. Nous voici vraiment en plein roman ténébreux. Ombre de Pixérécourt, pardonne !… Un beau matin, Berlioz quitte Rome, emportant un poignard et des pistolets : son projet était de s’introduire sous un déguisement chez la belle infidèle, de la tuer et de se suicider après : « J’avais à punir, nous dit-il, deux coupables et un innocent… » A Florence, une modiste lui vend un costume de soubrette ; à Gênes, une seconde modiste lui refuse un second costume, le premier ayant été perdu en route ; vers Porto-Maurizio, Savone, le voyageur commençait à revenir à des sentiments moins féroces et l’instinct de la conservation l’aiguillonnait un peu. On se rappelle que tout élève qui franchissait sans permission la frontière italienne était regardé comme déserteur et rayé de la liste des pensionnaires de l’Académie ; cette considération n’était pas à dédaigner. Réflexion faite, Berlioz jugea prudent de s’arrêter sur la pente du crime ; il avait continué de courir en poste le long des falaises de la Corniche et il se trouvait, non à Vintimille, comme il le dit dans ses Mémoires, mais à Diano Marina, petite ville de l’ancien duché de Gênes, aux environs d’Oneille. De là, il écrivit à M. Horace Vernet, directeur de l’Académie de France à Rome, une lettre dont nous ne possédons que des fragments.

« Diano Marina, 18 avril 1831.

«…Un crime odieux, un abus de confiance dont j’ai été pris pour victime, m’a fait délirer de rage depuis Florence jusqu’ici. Je volais en France pour tirer la plus juste et la plus terrible vengeance ; à Gênes, un instant de vertige, la

  1. . Voir la lettre XXVII de notre recueil.