Page:Bernard - Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, Baillière, 1865.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
54
du raisonnement expérimental.

croître par l’aveugle logique de l’analyse, si l’expérience ne vient à chaque pas servir de boussole et de règle.[1] »

La mécanique rationnelle et la physique mathématique forment donc le passage entre les mathématiques proprement dites et les sciences expérimentales. Elles renferment les cas les plus simples. Mais, dès que nous entrons dans la physique et dans la chimie, et à plus forte raison dans la biologie, les phénomènes se compliquent de rapports tellement nombreux, que les principes représentés par les théories, auxquels nous avons pu nous élever, ne sont que provisoires et tellement hypothétiques, que nos déductions, bien que très logiques, sont complètement incertaines, et ne sauraient dans aucun cas se passer de la vérification expérimentale.

En un mot, l’homme peut rapporter tous ses raisonnements à deux critériums, l’un intérieur et conscient, qui est certain et absolu ; l’autre extérieur et inconscient, qui est expérimental et relatif.

Quand nous raisonnons sur les objets extérieurs, mais en les considérant par rapport à nous suivant l’agrément ou le désagrément qu’ils nous causent, suivant leur utilité ou leurs inconvénients, nous possédons encore dans nos sensations un critérium intérieur. De même, quand nous raisonnons sur nos propres actes, nous avons également un guide certain, parce que nous avons conscience de ce que nous pensons et de ce que nous sentons. Mais si nous voulons

  1. J. Bertrand, Éloge de M. Sénarmont, discours prononcé à la 6e séance publique et annuelle de la Société de secours des amis des sciences.