Page:Bernard - Laodamie, reine d’Épire.djvu/16

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Tel eſt l’amour forcé qui vers Gelon m’entraîne :
Rien ne flatta jamais cette ſecrette peine ;
Je le voyois pourtant n’engager point ſa foi,
Ses hommages encor pouvoient tourner vers moi.
Mon ame, malgré moi, d’une maniere avide
Saiſiſſoit un eſpoir ſi faux, ſi peu ſolide ;
Et d’une vaine erreur le charme ébloüiſſant
Formoit à mes devoirs un obſtacle puiſſant.
Pour m’ôter cette erreur trop chere à ma foibleſſe,
Je pris ſoin d’engager Gelon à la Princeſſe.
Combien m’en coûta-t’il ! à quels combats livré,
Combien mon triſte cœur ſe vit-il déchiré !
Quels efforts ! Je croyois à moi-même ſevere,
Que l’on guerit l’amour quand on le deſeſpere,
Mes ſoins pour l’engager eurent trop de ſuccès,
Ma rivale en joüit. Helas à quel excès
Eſt allé cet amour qui me doit ſa naiſſance !
Il n’en falloit pas tant pour m’ôter l’eſperance.
Inutile ſecours pour ma foible raiſon,
Je croyois de leurs feux tirer ma gueriſon,
Et de chagrins jaloux je me trouve ſaiſie !
Quel remede à l’amour ! Ciel ! que la jalouſie…

ARGIRE.

Peut-être viendra-t’il enfin à vous guerir ;