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ET VIRGINIE

pêcheurs qu’on avoit tirées bien avant sur le sable.

À quelque distance de là nous vîmes, à l’entrée du bois, un feu autour duquel plusieurs habitants s’étoient rassemblés. Nous fûmes nous y reposer en attendant le jour. Pendant que nous étions assis auprès de ce feu un des habitants nous raconta que dans l’après-midi il avoit vu un vaisseau en pleine mer porté sur l’isle par les courants ; que la nuit l’avoit dérobé à sa vue ; que deux heures après le coucher du soleil il l’avoit entendu tirer du canon pour appeler du secours, mais que la mer étoit si mauvaise qu’on n’avoit pu mettre aucun bateau dehors pour aller à lui ; que bientôt après il avoit cru appercevoir ses fanaux allumés, et que dans ce cas il craignoit que le vaisseau, venu si près du rivage, n’eût passé entre la terre et la petite isle d’Ambre, prenant celle-ci pour le coin de Mire, près duquel passent les vaisseaux qui arrivent au Port-Louis ; que si cela étoit, ce qu’il ne pouvoit toutefois affirmer, ce vaisseau étoit dans le plus grand péril. Un autre habitant prit la parole, et nous dit qu’il avoit traversé plusieurs fois le canal qui sépare l’isle d’Ambre de la côte ; qu’il l’avoit sondé, que la tenure et le mouillage en étoient