Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/169

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férence à son gré, s’il importe. Et l’on peut comparer, n’est-ce pas ? la poésie à la lumière, au feu — s’il fallait faire ressembler les poèmes parnassiens à un globe astral de cercle délimité, il faudrait bien faire ressembler les poèmes rimbaldiens de 1872 au rayonnement illimité des étoiles car, en effet, ils sont plus lointains, plus avant dans l’infini. Non, ce ne sont pas là des vers faux exprès. Ce sont des vers se libérant, rompant la muraille qui les encerclait.

Et les innovations prosodiques de Rimbaud iront crescendo, nécessairement et vite, jusqu’à la création entière du vers libre qui amènera, logiquement, la prose inouïe des Illuminations.


BONNE PENSÉE DU MATIN

À quatre heures du matin, l’été,
Le sommeil d’amour dure encore.
Sous les bosquets l’aube évapore
       L’odeur du soir fêté.

Mais là-bas dans l’immense chantier
Vers le soleil des Hespérides,
En bras de chemise, les Charpentiers
       Déjà s’agitent.

Dans leur désert de mousse, tranquilles,
Ils préparent les lambris précieux
Où la richesse de la Ville
       Rira sous de faux cieux.