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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

fant, on peut dire que l’un et l’autre étaient également bienvenus.

Le temps se passa ainsi, et l’heure arriva où la plupart des écoliers retournaient chez eux pour prendre leur repas. Ce jour-là, ils se retirèrent avec d’autant plus d’empressement qu’ils avaient hâte de montrer à leurs familles les modestes présents qu’ils avaient reçus et qui étaient d’un prix inestimable à leurs yeux. Quelques-uns seulement restèrent dans la classe ; et, tirant de dessous le banc des paniers qui contenaient leurs provisions de la journée, ils commencèrent leur dîner sous la surveillance de madame Fleuriot.

Lucile, supposant non sans raison que la visiteuse devait avoir besoin d’air après cette longue séance, engagea la prétendue marquise à passer dans le jardinet dont nous avons parlé. Là, assises sur un banc de pierre, à l’ombre d’une tonnelle de vigne, elles parent causer avec autant de liberté que le permettaient leurs positions respectives.

— Une matinée charmante, mademoiselle Fleuriot, charmante en vérité ! disait Fanny en minaudant ; j’aurai long temps devant les yeux ces figures rondes et joufflues, je croirai toujours entendre les cris de joie de ces pauvres en fants lorsque je leur distribuais des babioles sans valeur… Une chose m’offusque pourtant, madame l’institutrice ; il me semble que ma visite était attendue, et je n’ai pu jouir de la surprise sur laquelle je comptais.

Lucile avoua que le vicomte, en passant le matin avec Raymond, lui avait dit quelques mots des projets de la marquise.

— Ah ! répliqua Fanny avec aigreur, M. Hector ferait bien de s’occuper de ce qui le regarde… Il aurait pu essayer de vous être agréable sans l’être aux dépens de… sa sœur.

— Madame ! balbutia Lucile en baissant la tête avec embarras.