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II

LES RAISONS DE CÉCILIUS

La nouvelle d’une persécution imminente avait d’abord atterré Cécilius Natalis. Jusqu’au moment du départ de Cyprien, il était resté en proie à l’obsession des terrifiantes images évoquées par son ami. Puis bientôt son esprit lucide et ferme avait repris le dessus. Et d’abord, sitôt l’évêque parti, il s’était empressé de quitter la villa des Thermes pour rentrer à Muguas, afin d’ôter tout prétexte aux accusations. Il convenait que la maison où les magistrats soupçonnaient une réunion illicite fût abandonnée par son maître, comme en témoignage officiel d’obéissance aux ordres du légat.

Dans ce calme milieu de Muguas, auprès de Birzil insouciante et rieuse, il n’était pas devenu précisément plus optimiste, mais ses idées et ses sentiments avaient repris leur pente habituelle. Encore une fois, il cherchait à s’adapter aux circonstances, à sauvegarder la paix, en tâchant de concilier les intérêts et de désarmer les haines. Son besoin un peu égoïste de repos s’accommodait trop bien de ce parti pris de modération et de cette sagesse pratique, dont il sentait toutes les insuffisances. Cependant la haute supériorité morale de Cyprien l’humiliait secrètement, et il regrettait que leur rencontre, au lieu de les rapprocher, les eût peut-être séparés davantage. Leurs cœurs ne s’étaient pas suffisamment parlé. C’était sa faute sans doute, à lui Cécilius, qui avait eu