Bien que tous les êtres qui n’entrent pas dans la classe des animaux n’aient point de sexe, il y a cependant des végétaux qui semblent admettre cette distinction :
Notre âge a découvert, ô merveille inouïe. (Rosset).
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La plante a son hymen, la plante a ses amours, (Delille).
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Cette distinction, il est vrai, est si difficile à reconnaître, qu’elle est pour ainsi dire nulle pour la plupart des gens du monde.
Les anciens, dit M. Cuvier dans ses notes sur Delille, n’ignoraient pas que le palmier femelle a besoin de la poussière du palmier mâle pour être fécondé ; mais ils n’avaient point étendu cette découverte aux autres plantes. Le premier qui prouva, par des expériences décisives, la nécessité du concours des deux sexes dans les végétaux, fut Vaillant, démonstrateur de botanique au Jardin des Plantes de Paris ; mais il ne réussit point à persuader son contemporain Tournefort, qui continua à regarder la poussière des étamines comme un simple excrément.
Linnée a beaucoup contribué à rendre générale l’opinion de Vaillant, et Kœlteuter l’a mise hors de doute, en produisant des mulets végétaux ; la poussière des étamines d’une espèce, portée sur le pistil d’une espèce voisine, donné des individus de forme intermédiaire ; et comme ces mulets végétaux ne sont pas tous inféconds, il est possible de changer par degré une espèce en une autre[1].
Ainsi, on ne devra donc pas s’étonner, si, en parlant de certaines plantes, de certaines fleurs, les écrivains on dit : plante mâle, plante femelle, comme le prouvent les citations suivantes :
males
Le mâle (de la saussaie) fait voler à travers la campagne, (Castel.)
(Encyclopédie moderne.)
(Millin.)
(Castel.)
(J.―J. Rousseau.)
(Encyclopédie moderne.)
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femelles.
Les fleurs femelles du noyer sont remplacées par des fruits charnus ; ils renferment une noix bivalve. (Millin.)
(J.―J. Rousseau.)
(Millin.)
(J.―J. Rousseau.)
(Id.)
(Id.)
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- ↑ Un médecin naturaliste du siècle dernier, le docteur Traute, s’est amusé à rédiger en vers latins le système de Vaillant, sur les sexes et l’hymen des fleurs. Il en est résulté, sous le titre de Connubia florum, un petit poème, qui n’a été ni inconnu ni inutile à Delille : — Un poète anglais ; Darwin, a également chanté les amours des plantes. Ce poème, que les Anglais citent comme un chef-d’œuvre, a eu plusieurs éditions en Angleterre, et a été traduit dans notre langue par un homme de goût, M. Deleuze, qui l’a fait, précéder d’un discours préliminaire remarquable par la pureté du style.