Page:Bever-Léautaud - Poètes d’aujourd’hui, II, 1918.djvu/255

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Mais je fus aussi pénétré,
Ô Paris, de clartés intimes,
Et l’amour que tu m’as montré
M’aura conduit sur d’autres cimes :

Car, sous ton ciel, le sentiment
Comme une fleur embaume et passe
Et tu recherches seulement
Le plaisir de toute une race !

Et j’ai subi l’enchantement
Que tu verses aux cœurs, ô ville,
Qui revêts par ton mouvement
La splendeur d’un astre immobile !

{La Beauté de Paris)

AU JARDIN DU LUXEMBOURG

Que de cœurs, ô jardin, sous tes calmes ombrasses,
Que de cœurs ont saigné ! Tous ceux qui sont ici,
Femmes et jeunes gens, portent sur leurs visages
Le signe de l’amour ou l’éclat du souci !

Les uns, adolescents hantés par la chimère,
Viennent te confier leurs plus chères ardeurs,
Ta verdure est pour eux comme une bonne mère
Qui préserve leur âge et nourrit leurs candeurs.

D’autres, déjà vaincus par l’amour ou la gloire,
Esprits désabusés et flétris dans leur fleur,
Te demandent, jardin, d’endormir leur mémoire
Et de mettre ton charme entre eux et leur douleur !

J’en ai connu qu’un jeu du soleil sur tes marbres,
Un éclair de tes eaux au passage du vent,
Une fleur qui brillait sous l’ombre de tes arbres,
Ou le pigeon dans l’air limpide s’élevant,

Retenaient et troublaient jusqu’au fond de leur âme !
Sans doute que ceux-là cherchaient dans le jardin