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Page:Bibaud - Histoire du Canada sous la domination française, Vol 1, 1837.djvu/38

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Tout son monde se montait à vingt-cinq personnes. L’équipage de son navire, qui était de trente-cinq hommes, se joignit aux nouveaux colons, pour élever des maisons ou des cabanes. Lorsqu’on fut logé, on se mit à cultiver la terre ; mais à peine la colonie commençait à se former, qu’un orage imprévu la renversa de fond en comble. Samuel Argall, qui escortait, avec un vaisseau de quatorze canons, une dixaine de bateaux pêcheurs partis de la Virginie, apprit, en route, que des étrangers s’établissaient à Pantagoet, et ne doutant pas que ce ne fussent des Français, il crut qu’il était de son devoir de les en chasser. Quoique la Saussaye ignorât le dessein des Anglais, il crut devoir se préparer à tout événement : il demeura à terre, pour défendre son fort, et chargea Lamotte-le-Villain, son lieutenant, de la défense du navire, qui était en rade ; mais ni l’un ni l’autre n’avaient de canons. Argall s’attacha d’abord au retranchement, et après l’avoir canonné quelque temps d’assez loin, il s’en approcha de plus près, et fit un grand feu de mousquetterie, qui tua beaucoup de monde. La Saussaye voyant qu’une plus longue résistance lui ferait perdre inutilement un plus grand nombre d’hommes, prit le parti de se rendre, et Lamotte-le-Villain fut bientôt contraint d’en faire autant.

Argall, maître de l’habitation, alla visiter les coffres de la Saussaye, y trouva sa commission, et l’enleva, sans que personne s’en apperçût. Le lendemain, la Saussaye étant allé rendre visite à son vainqueur, celui-ci le somma de présenter la commission qu’il avait lui-même soustraite. La Saussaye l’ayant cherchée en vain, Argall le traita d’homme sans aveu et de pirate, et livra l’habitation et le navire