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Après son couronnement à Bologne le mot élu cessa de figurer dans ce formulaire.

Les dispositions de la bulle d’or voulaient que Charles-Quint assemblât la diète de l’empire à Nuremberg : à cause de la peste qui régnait en cette ville, il la convoque à Worms, où il arrive le 28 novembre. Il demande à la diète les moyens d’aller recevoir la couronne impériale à Rome; elle vote la levée d’une armée de vingt-quatre mille hommes pour l’y accompagner, à condition qu’elle ne pourra être employée à aucune autre entreprise. D’accord avec lui, elle réorganise la chambre impériale et le conseil de régence; elle attribue à celui-ci l’autorité qui appartenait à l’empereur, lorsqu’il sera absent, sauf en ce qui concerne la collation des grands fiefs. Les doctrines et les publications de Luther mettaient en trouble toute l’Allemagne; deux fois excommunié par le pape, le fougueux augustin ne gardait plus aucun ménagement dans ses invectives contre le saint-siége. L’empereur le cite à comparaître devant la diète, pour se justifier, en lui donnant un sauf-conduit et un héraut chargé de l’accompagner. Luther entre à Worms le 16 avril 1521. Le lendemain il va faire la révérence au chef de l’empire, qui l’accueille avec courtoisie. Le même jour il est appelé devant la diète. Le docteur Jean Eck, fiscal de l’archevêque de Trèves, l’invite à répondre sur ces deux points : si tous les livres qui ont paru sous son nom et dont il lui remet la liste, sont bien de lui, et s’il entend affirmer les maximes qui y sont contenues, ou les révoquer en tout ou en partie. Luther se reconnaît l’auteur de ces livres; il réclame un délai pour répondre sur le deuxième point. Le fiscal, après avoir pris les ordres de l’empereur, lui accorde vingt-quatre heures de réflexion. Le 18 avril il est ramené devant la diète : il prononce un long discours qu’il conclut en disant qu’il ne peut ni ne veut rien révoquer de ce qu’il a écrit, et qu’il n’entend le faire jusqu’à ce qu’on le convainque de ses erreurs par le témoignage de l’Écriture sainte et par des raisons solides, sans alléguer l’autorité du pape ni des conciles, qu’il n’admet pas. L’assemblée se sépare dans une grande agitation. Le 19, Charles-Quint fait présenter à la diète un écrit où il annonce l’intention, vu la pertinacité de Luther, de ne plus l’entendre et de le traiter en ennemi de l’Église. Il consent cependant, à la prière de plusieurs de ses conseillers, à lui accorder encore trois jours, pendant lesquels des théologiens choisis par l’archevêque de Trèves cherchent à l’ébranler, mais en vain. Il fait alors commandement à Luther de sortir de Worms, et le 8 mai, de l’avis et avec le concours des électeurs, des princes et des états de l’Empire, il rend un édit où il le déclare schismatique et hérétique notoire; défend à tous et un chacun de le recevoir, soutenir ou favoriser; ordonne de procéder contre lui et contre tous autres hérétiques ses complices et fauteurs; interdit la lecture, la vente ou la possession de livres sortis de sa plume; enjoint de saisir ces livres partout où on les trouvera et de les brûler, de même que tous écrits, images, peintures contre la foi catholique, et enfin soumet à l’approbation préalable de l’ordinaire de chaque diocèse l’impression des livres traitant de matières religieuses. Cette déclaration est bientôt suivie de la clôture de la diète. Charles quitte Worms le 31 mai.

Trois jours auparavant, il avait perdu l’homme qui avait guidé sa jeunesse, qui l’avait initié aux combinaisons de la politique, et dont il n’avait cessé de suivre les avis avec une condescendance que des historiens ont taxée de déférence aveugle. Est-il vrai, comme le dit Robertson, sans le prouver, que la mort du seigneur de Chièvres ne lui causa point de regrets? On ne saurait contester, en tout cas, que Guillaume de Croy n’ait été un ministre tout dévoué à la gloire et à la grandeur de son maître, en même temps qu’un des hommes d’État les plus habiles de son époque. Il est fâcheux pour sa mémoire qu’on puisse lui reprocher une avidité sans scrupule, car il était insatiable d’honneurs et de richesses. Charles donna la charge de grand chambellan, qu’il remplissait, au comte Henri de