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charge spirituelle, mais encore de son autorité temporelle, à condition qu’il convoquerait un concile universel pour la réforme de l’Église et l’extirpation de l’hérésie luthérienne; qu’il remettrait entre les mains de l’empereur Ostie, Civita Castellana et Forli, et qu’il donnerait en otage ses neveux ainsi que plusieurs princes de l’Église; une convention particulière régla les termes de payement des 250,000 écus qu’il lui restait à compter aux troupes impériales. Le 10 décembre était le jour fixé pour sa mise en liberté; dans son impatience, la nuit précédente, il s’enfuit du château Saint-Ange déguisé en marchand.

Malgré l’état de guerre existant entre l’empereur et les signataires de la ligue de Cognac, des ambassadeurs de France, de Venise, de Florence, de Milan, n’avaient pas cessé de résider à sa cour. Au mois de juillet 1527 arriva à Valladolid un nouvel ambassadeur français, l’évêque de Tarbes; il était accompagné d’un envoyé du roi d’Angleterre : Henri VIII, quoiqu’il eût conclu, le 29 mai, un traité d’alliance offensive et défensive avec François Ier, se donnait comme médiateur entre lui et Charles-Quint. L’évêque de Tarbes entama, avec l’empereur et ses ministres, des négociations de paix qui furent continuées à Palencia et à Burgos, où la cour impériale s’était transportée. On était à peu près tombé d’accord : Charles-Quint acceptait, pour la rançon du dauphin et du duc d’Orléans, deux millions d’écus, sur lesquels devaient être décomptées les sommes qu’il avait à payer au roi d’Angleterre; il consentait à ce que l’article du traité de Madrid qui concernait le duché de Bourgogne fut annulé, et que la détermination de la cause du duc Sforza fût remise à des juges non suspects; François Ier s’engageait à rappeler ses troupes d’Italie, à restituer Gênes ainsi que les autres places dont elles s’étaient emparées. Mais le roi prétendait qu’avant tout ses fils lui fussent remis, et l’empereur, que l’expérience avait rendu prudent, regardait comme un préalable dont il ne pouvait se départir l’accomplissement des stipulations relatives à l’Italie. Encouragé par l’alliance de l’Angleterre et par les succès récents de ses armes, François, à la fin de novembre, envoya le secrétaire Bayard à ses ambassadeurs, avec l’ordre d’insister auprès de l’empereur sur les propositions qu’ils avaient faites, et, au cas qu’il ne voulût point y souscrire, de lui intimer la guerre. Charles-Quint était animé d’intentions pacifiques; il engagea les ambassadeurs à demander de nouvelles instructions; il offrait toutes les sûretés que le roi pouvait désirer pour la délivrance des princes ses fils. L’évêque de Tarbes et ses collègues s’excusèrent d’en référer à leur cour, étant liés par les ordres qu’ils avaient reçus. Le 21 janvier 1528, ils se présentèrent au palais de l’empereur en compagnie des ambassadeurs d’Angleterre, de Venise et de Florence[1] : l’évêque de Tarbes porta la parole; il dit en substance que, tout espoir de paix étant évanoui, ils venaient prendre congé de Sa Majesté Impériale. Charles, sans s’émouvoir, leur répondit qu’il regrettait beaucoup que les rois et les républiques dont ils étaient les ministres eussent si peu d’égard à ce qu’exigeaient le bien et la paix de la chrétienté; il leur souhaita un bon voyage, mais en les prévenant qu’ils ne sortiraient de ses royaumes que quand ses propres ambassadeurs en France, en Angleterre et à Venise seraient en des lieux, où l’échange des uns avec les autres se pourrait effectuer. Le jour suivant, il les fit conduire, sous bonne garde, à Poza, à huit lieues de Burgos.

Avec le secrétaire Bayard étaient venus à Burgos, sous des déguisements, Guyenne, roi d’armes de France, et Clarenceaux, roi d’armes d’Angleterre. Le 22 janvier ils firent supplier l’empereur de leur donner audience : Charles-Quint la leur accorda sur-le-champ; il les reçut entouré de sa cour, de ses conseils et d’une foule de grands personnages. Après avoir fait les révérences d’usage, les deux hérauts s’approchèrent de l’empereur et, par la bouche de Clarenceaux, lui demandèrent que, suivant les lois obser-

  1. L’ambassadeurr du duc de Milan ne se réunit pas à eux, et ce fut, d’après une résolution prise en commun, pour ne pas indigner l’empereur : « per non sdegnar Cesare ». (Cicogna, vol. VI, p. 202. )