Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/329

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route. Il aurait souhaité faire ses adieux au roi à Paris même; il aurait ainsi achevé plus rapidement, son voyage[1] : mais François voulut le conduire jusqu’aux frontières de son royaume, et ce fut seulement à Saint-Quentin, le 20 janvier, qu’ils se séparèrent. Le dauphin et le duc d’Orléans continuèrent d’accompagner l’empereur, qui, le même jour, arriva avec eux à Cambrai. Il y trouva une partie des seigneurs des Pays-Bas, ayant à leur tête le duc d’Arschot, lieutenant, capitaine général et grand bailli de Hainaut. Le 21 il entra à Valenciennes, où la reine sa sœur l’attendait, entourée de la duchesse douairière de Milan, des dames principales du pays, des évêques de Tournai et d’Utrecht et des seigneurs qu’elle avait gardés auprès d’elle. Les princes retournèrent en France le 24. Le 26 l’empereur et la reine quittèrent Valenciennes; ils arrivèrent à Bruxelles le 29.

Charles avait donné audience, à Valenciennes, à la députation gantoise[2]. Le 9 février il part de Bruxelles avec sa sœur et sa nièce la duchesse de Milan, suivi de sa maison, de sa garde et d’une foule de grands personnages. C’est à la tête de ce cortége et des cinq compagnies d’hommes d’armes des Pays-Bas qu’il entre, le 14, à Gand, où il avait été précédé d’un corps d’infanterie levé récemment en Allemagne par ses ordres[3]. La première mesure qu’il prend a pour objet la mise en liberté des deux hauts pointres de la châtellenie de Courtrai qui avaient été amenés dans les prisons de la ville. Il ordonne l’arrestation des principaux auteurs des troubles. Quelques-uns de ceux-ci avaient pris la fuite : il mande à ses officiers de la Flandre et du Brabant de les arrêter, s’ils les découvrent dans les lieux de leur juridiction; il défend à tous ses sujets, sous peine de punition corporelle, de leur donner asile ou de cacher leur retraite. Il enjoint aux échevins de renouveler leur serment suivant la formule prescrite par la paix de Cadsant. Dès le surlendemain de son arrivée, ceux-ci lui avaient présenté une requête où ils le suppliaient de les maintenir en leurs libertés et priviléges : il les fait comparaître devant lui, le 24 février, en l’une des salles de son palais, dont les portes avaient été ouvertes au public. Là le procureur général, Me Baudouin Le Cocq, prononce un long réquisitoire qu’il termine en déclarant que les Gantois, par les délits dont ils se sont rendus coupables, ont encouru la perte de leurs corps, de leurs biens et de tous leurs priviléges. Les échevins demandent copie de ce réquisitoire, qui leur est accordée, avec le temps nécessaire pour y répondre. Charles et Marie vont à Bruxelles au-devant de leur frère le roi des Romains, qu’ils amènent à Gand. Aussitôt après son retour, l’empereur ordonne la levée de l’aide de quatre cent mille florins dans les localités de la Flandre où elle restait à recouvrer en tout ou en partie; il prescrit que les impôts et accises dont la perception a été suspendue dans la ville durant les troubles, y soient rétablis. Le 6 mars les échevins se rendent au palais et présentent leur réponse aux accusations formées contre eux. L’avocat fiscal près le grand conseil, Me Pierre du Breul, prend la parole : il s’émerveille de leur audace et de leur arrogance; il réfute, de point en point, ce qu’ils ont allégué pour leur justification; il conclut, en son nom et en celui du procureur général, à ce que leurs priviléges soient revoqués et que l’empereur règle le gouvernement de la ville de telle sorte qu’à l’avenir la sédition dont elle a été le théâtre ne se renouvelle plus. L’empereur annonce qu’il fera connaître sous peu sa détermination.

  1. Lettre de Charles au cardinal archevêque de Tolède du 6 janvier 1540. (Relation des troubles, p. 653.)
  2. Les récits varient sur le langage que Charles-Quint tint aux députés. Tandis que ce langage aurait été sévère et menaçant selon la Relation des troubles, il aurait, au contraire, d’après le Cort verhael, dont nous avons fait précéder cette Relation, été très-amical
  3. Ce corps avait un effectif de trois mille cent et Quatre-vingt dix hommes. (Lettre de Charles-Quint au cardinal de Tolède du 14 février, dans la Relation des troubles, p. 668.)