Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/445

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le 1er janvier 1553, après avoir donné ses ordres pour la levée du siége, il retourne à Thionville. Le même jour, l’armée commence son mouvement de retraite, qui s’opère sans que les assiégés y mettent obstacle. Tandis qu’une partie en est dirigée vers les lieux où elle doit prendre ses quartiers d’hiver, une autre partie en est licenciée : l’empereur ne conserve à sa solde que vingt-six enseignes de Hauts-Allemands, mille reîtres, les chevau-légers et les vieilles bandes espagnoles. Albert de Brandebourg regagne l’Allemagne le 5 janvier.

De Thionville, Charles était venu, le 18, à Luxembourg. Il comptait ne s’y arrêter que vingt-quatre heures : la goutte l’y surprend et l’y retient jusque vers la fin du mois[1]. Il arrive, le 5 février, à Bruxelles, où il est reçu avec de grands transports d’allégresse[2]. Les états généraux, que la reine régente avait convoqués par son ordre, l’attendaient dans cette capitale; il les assemble le 13 en sa présence. Dans la proposition dont il leur fait donner lecture, il les remercie d’abord du concours qu’ils ont prêté à son gouvernement au milieu des circonstances difficiles où le pays s’est trouvé; « se démontrant en ce bons, loyaux et affectionnés sujets, tels qu’il les a toujours trouvés et connus; » il livre ensuite à leur appréciation la conduite du roi de France, qui, sous couleur d’amitié, a occupé une partie des États du duc de Lorraine; qui a circonvenu plusieurs villes du saint-empire pour s’en impatroniser et les soumettre à la cruelle servitude en laquelle il tient son royaume; qui a suscité contre lui plusieurs des princes de la Germanie; qui, non content de tout cela, s’est montré l’ennemi mortel de la chrétienté, en sollicitant le Turc d’envoyer son armée de mer contre l’Italie et de faire attaquer la Hongrie et la Transylvanie par son armée de terre. Il rappelle que, lorsque les Pays-Bas se virent menacés des Français, il voulut y accourir pour les défendre, mais que les « forces corporelles » lui manquèrent et qu’il fut obligé de retourner sur ses pas. Il déduit les raisons qui l’ont engagé à mettre le siége devant Metz. Il dit que, s’il a renoncé à cette entreprise, c’est que « le temps et la saison ont été si rudes et contraires que tous les jours défaillaient les gens, pour non pouvoir comporter, en temps si froid, les guets qu’il fallait faire de tous côtés. » Il termine par un appel pathétique au patriotisme et au dévouement des états[3]. Le lendemain la reine réunit les députations des provinces séparément, et leur demanda des subsides dont le chiffre total s’élevait à trois millions de florins : cette somme fut en grande partie accordée.

L’année 1552 avait été la plus malheureuse du règne de Charles-Quint. En Allemagne il s’était vu réduit à fuir devant ses ennemis; il avait été forcé de souscrire à un traité qui renversait tout l’édifice, si laborieusement élevé, de son pouvoir; il avait échoué dans son entreprise pour faire rentrer l’Empire en possession des territoires qu’Henri II lui avait enlevés. Aux Pays-Bas les Français restaient maîtres des places dont ils s’étaient emparés au début de la campagne; la seule conquête que les généraux de l’empereur eussent faite sur eux, celle de Hesdin, ils n’avaient pu la conserver. En Italie, Sienne, fatiguée des exactions des soldats espagnols qui la gardaient et des insolences de leur chef, D. Diego Hurtado de Mendoza, les avait chassés; elle avait appelé les Français à son aide. Charles ressentait vivement ces disgrâces : il ne s’en laissait point abattre toutefois; énergiquement secondé par la reine Marie, il se disposa à rétablir l’honneur de ses armes dans la campagne qui allait s’ouvrir. Tandis que la cour de

  1. Lettres du comte d’Egmont du 20 janvier, et du docteur Baersdorp, des 22, 23 et 30 janvier, à la reine Marie. (Arch. impér. à Vienne)
  2. Lettres du comte de Stroppiana au duc de Savoie, des 4 et 9 février 1553.
  3. Archives du royaume : reg. Propositions aux états généraux, 1535-1563, fol. 212.