Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/58

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accusations aussi futiles qu’inconvenantes, mais le gouvernement n’en tint aucun compte et de plus en plus aveuglé par la passion, il se décida à faire arrêter l’évêque qu’il traitait de séditieux. Le prélat, en fut averti à temps et, comme il ne pouvait soumettre à un tribunal laïque une question de doctrine, il prit le parti de se retirer en France. Les poursuites n’en continuèrent pas moins; le 8 novembre 1817, la Cour d’assises du Brabant méridional condamna par contumace le nommé Maurice de Broglie à la peine de la déportation, pour avoir publié le Jugement doctrinal, entretenu une correspondance avec Rome, sans l’autorisation de M. Goubau, et laissé afficher des annonces d’indulgences plénières, métamorphosées en bulles pour le besoin de la cause. Le vendredi 19 novembre, cet arrêt fut affiché par le bourreau à un poteau placé entre deux voleurs que la loi ne permettait point d’exposer ce jour-là. Un tel spectacle excita une indignation difficile à peindre et fut flétri par les journaux les plus hostiles aux catholiques : on le regarda, en effet, comme un premier coup porté à l’existence du royaume des Pays-Bas. Plus tard, l’évêque adressa à ce sujet aux souverains réunis à Aix-la-Chapelle une Réclamation respectueuse, qui demeurera comme un monument curieux pour l’histoire de l’Église en Belgique. Depuis lors Maurice habita la France, en proie à des infirmités et aux chagrins que lui causait le gouvernement hollandais qui, dans son ignorance des lois canoniques, prétendait qu’il avait perdu sa juridiction et qui ne cessa de persécuter le clergé de Gand jusqu’à la mort de l’évêque. L’acquittement de ses vicaires généraux et de son secrétaire, prisonniers depuis plusieurs mois, adoucit ses dernières souffrances et, après avoir reçu les derniers sacrements, il dicta une lettre touchante au clergé et aux fidèles de son diocèse que sa main défaillante put à peine signer. M. de Quelen, archevêque de Trajanople et coadjuteur de Paris, officia dans l’église de Saint-Sulpice à ses funérailles, en présence d’un nonce du pape et d’un grand nombre d’évêques, de pairs et de députés. Le corps fut déposé dans les caveaux de Saint-Sulpice et ne put être d’abord transporte à Gand, où l’illustre émule de saint Athanase avait élu sa sépulture. Son cœur repose sous un modeste monument érigé, dans la chapelle du grand séminaire, aux victimes de la persécution de 1813.

J.-J. De Smet.

Mgr H.-J. Bracq, Notice historique sur Mgr de Broglie, dans le Recueil des mandements, lettres pastorales, etc., du même prélat. — Lettres de Mgr Carletti, évêque de Montepulciano, dans le tome XIII des Mémoires de l’abbê Baraldi. — J.-J. De Smet, Coup d’œil sur l’ histoire ecclésiastique, etc.

BROOMAN (Louis), musicien, né à Bruxelles en 1527, mort le 8 janvier 1597, était fils de Jacques et de Cornélie van Heyleweghe, issus tous deux de familles patriciennes. Brooman était aveugle de naissance; mais, grâce à ses dispositions naturelles et surtout à sa persévérance, cette infirmité ne l’empêcha point d’achever ses études, d’acquérir d’abord le grade de maître ès arts, puis celui de licencié en droit et enfin, ce qui était plus difficile encore, un tel renom qu’on le qualifia de prince de la musique de son temps. Il est à regretter que, tout en constatant sa grande réputation, Vossius (De naturâ artium, t. I, c. iv) et Sweertius (Selectæ Christiani orbis deliciæ, p. 473), n’aient pas donné de détails sur ses productions. Peut-être ne fut-il qu’un célèbre exécutant. Cette célébrité est en tout cas, dit M. Fr. Fétis, fort oubliée de nos jours. Il mourut à Bruxelles, à l’âge de soixante-neuf ans et sa veuve, Gertrude De Keysere, fit placer son épitaphe dans l’église des PP. Récollets de la même ville.

Louis Brooman eut de son mariage avec Gertrude De Keysere, trois filles et deux fils, Jacques, mort sans alliance et Charles, qui épousa Marie van Gindertaelen, dont il eut Louis, qui fait l’objet de l’article suivant.

Aug. Van der Meersch.

Sweertius, Selectæ Christiani orbis deliciæ, p. 473. — Vossius, De Naturâ artium, liv. I, ch. iv. — Paquot, Mémoires littéraires, t. VII. — Fétis, Biographie universelle des Musiciens. — Eendragt, 13 janvier 1830, n° 17.

BROOMAN (Louis), poëte latin et flamand, issu d’une des sept familles patriciennes de Bruxelles, né en cette ville