Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/235

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régime des monarchies, qu’il peut en coûter cela pour les sauver !

Les troupes se mirent donc en mouvement, les canons roulèrent sur le pavé, et la guerre civile éclata dans Paris.

Quelle allait être l’issue de cette guerre ? Les savants, les hommes de lettres, presque tous les militaires, prirent en pitié les combattants et leur folie. M. Thiers courut chercher un refuge chez Mme de Courchamp dans la vallée de Montmorency. Dans les bureaux du Globe, M. Cousin parlait du drapeau blanc comme du seul drapeau que la nation put reconnaître ; et il reprochait à M. Pierre Leroux de compromettre ses amis par l’allure révolutionnaire qu’il faisait prendre au journal. Le rédacteur en chef du Globe, M. Dubois, se trouvait absent. Enfin, tout n’était que trouble, incertitudes, confusion dans les rangs de la haute bourgeoisie.

Il y avait parmi les écrivains les plus remarquables de ce temps, un homme à la taille élancée, aux mouvements brusques mais nobles, au front fuyant mais pensif. Il avait été soldat. Au premier bruit de la fusillade, il secoua tristement la tête puis, il s’en alla par la ville, sans armes et une baguette noire à la main, indifférent aux balles qui sifflaient autour de lui, et bravant la mort sans chercher le succès. Cet homme, destiné à un rôle illustre et malheureux, était peu connu alors il se nommait Armand Carrel. « Avez-vous seulement un bataillon, demandait-il sans cesse à ses amis plus confiants. » Dans la matinée du 28, passant sur le boulevard avec